Qui a dit que le tennis fabriquait des robots aux émotions enrubannées d’insignifiance ? Pour se convaincre du contraire, il suffit de regarder jouer Alizé Cornet, nouvelle numéro 1 française à l’expressivité chatoyante, de laisser s’exprimer cette Niçoise de 19 ans, volubile et curieuse de tout, et de permettre à cette chipie perspicace de virevolter entre précocité très structurée et enthousiasme à couettes.
Sur un court, la blondinette au petit nez pointu ne se contente pas de cajoler un coup droit somptueux et de développer un revers à deux mains précis comme une découpe laser. Entre deux points, pas du genre à s'abîmer dans la contemplation du tamis-miroir de sa raquette, elle s'apostrophe, se morigène, s'encourage, prend le public à partie, quand elle ne chahute pas avec lui. Quand tout va bien, elle irradie sans faux-semblant. Quand tout va mal, elle s'offre trois petites larmes, comme une purge express, puis s'en revient à sa bonne humeur constitutive et à ses pensées positives. Chez elle, c'est soleil ou pluie, mais jamais la mélancolie nuageuse des indécises, ni la grisaille pommelée des désabusées. Pierre Bouteyre, son entraîneur, aimerait qu'elle masque ses faiblesses, qu'elle durcisse la cuirasse pour gagner le combat mental. Elle prétend y travailler mais ne peut s'empêcher de verser dans une autojustification qui fleure bon le «Je maintiendrai». Argument numéro 1 : «Ce n'est pas parce que je partage mes émotions que cela me déstabilise.»<