Philippe Séguin a longtemps été la bête noire de la préposée à la buvette du stade de la Colombière, qui abrite les matchs de foot du Stade athlétique spinalien. Premier arrivé au stade, il était du coup le premier à la buvette - un sandwich et un canon -, et comme il n’avait jamais de monnaie sur lui, la fille allait encore en être quitte pour un gros billet contre la quasi-totalité des pièces de sa caisse. Séguin adorait le foot : les murs de son bureau à l’Assemblée nationale étaient décorés avec sa collection de maillots, et il n’y avait pas moyen de lui coller un rendez-vous ou un meeting un soir de Ligue des champions.
Au-delà, il adorait le sport : l’un de ses rêves était de créer à Epinal un pôle national consacré au pentathlon moderne, discipline confidentielle loin du bling bling du ballon rond. Sa passion était notoire. Au début des années 90, la compagnie pétrolière libyenne Tamoil, interdite en France pour cause d’embargo sur la Libye, sponsorisait l’AS Monaco : le club de la principauté a alors prêté pas moins de cinq (!) de ses joueurs à Epinal, Tamoil espérant par ce biais s’attirer les bonnes grâces d’un Séguin auquel on prédisait alors un destin national. L’intéressé avait fini par mettre le holà.
Sinon, il croyait au sport pour gommer les différences. Témoin ce discours, prononcé un jour dans sa mairie. «Aujourd'hui, je suis heureux. Je viens tout juste de voir un Arabe frapper un Blanc.» Regards affolés dans le public. «Oui, à la patinoire. Pen