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Libération

Les Belges des Américains

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publié le 23 février 2010 à 0h00

S’il existe bien un élément qui rassemble dans le même élan collectif et la même ferveur patriotique tous les Canadiens et toutes les Canadiennes, sans oublier de mentionner tous les Acadiens et toutes les Acadiennes, qu’ils fussent pêcheurs de l’Atlantique, trappeurs du Grand Nord ou bûcherons de la côte Pacifique, c’est la gentille détestation de l’Amérique, ce voisin si encombrant et si peu discret. «Putain, putain, c’est vachement bien, nous ne sommes quand même surtout pas des Américains» aurait pu être la rengaine entonnée par des dizaines de milliers de fans peinturlurés en rouge criard l’autre soir, lors de la rencontre de hockey au sommet entre le Canada et son grand frère ricain (5-3 pour les Etats-Unis). Une rencontre intense où, en coulisses, se jouait une question de fierté nationale et de suprématie régionale, un match à fleurets pas vraiment mouchetés entre la hautaine Amérique et sa paisible voisine. Leonard Cohen contre Bruce Springsteen, Douglas Coupland contre Bret Easton Ellis, le pistolet à eau contre la carabine 22 Long Rifles.

Le Canada, c’est une version d’Amérique à la sauce suédoise tendance helvétique mâtinée d’une pointe de belgitude. Le même souci de discrétion, le même esprit de réserve, la même tendance à ne pas trop la ramener, heureux de vivre au sein d’une nation où il n’est nul besoin de sauvegarder dans le buffet du salon une ribambelle de pistolets et d’armes de poings, où manger ne rime pas forcément avec s’engraisser, où le respect de la