Adam Habib est professeur de sciences politiques et vice-président de l’université de Johannesburg.
Quel est le bilan de «la nation arc-en-ciel» appelée de leurs vœux par Desmond Tutu et Nelson Mandela ?
L'Afrique du Sud peut revendiquer de fantastiques succès, mais déplorer aussi certains échecs. Il ne faut pas oublier qu'au milieu des années 80, tout le monde pariait sur une guerre entre Blancs et Noirs dans le pays. Finalement, nous avons eu la fin de l'apartheid, une élection multiraciale en 1994 et trois autres élections démocratiques depuis. La société est relativement stable et c'est l'une des plus remarquables histoires du XXe siècle. Nous avons pu établir une nouvelle Constitution et, économiquement, nous avons su maintenir une forte croissance. Mais il y a aussi de grosses faiblesses. Malgré la transition démocratique, l'inégalité entre les riches et les pauvres n'a jamais été aussi importante dans le pays. Et cette inégalité a engendré de nombreux problèmes sociaux, une augmentation de la criminalité ou encore des poussées de xénophobie contre les étrangers d'origine africaine.
Comment les relations raciales ont-elles évolué ?
Il y a toujours des tensions raciales mais pas autant qu’on pourrait l’imaginer. Les attitudes racistes existent des deux côtés, chez les Noirs comme chez les Blancs. On peut estimer par exemple que des tensions raciales se sont développées autour de la politique de discrimination positive en Afrique du Sud. Certains Blancs se sentent exclus du système, notamment les jeunes. Pourtant, toutes les études montrent que les jeunes diplômés blancs sortant de l’université ont toujours plus