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Libération
Interview

«Ici, le foot reste un sport de pauvres»

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Peter Alegi, professeur d’histoire de l’Afrique, spécialiste du ballon rond :
Des supporters agitent le drapeau de l'équipe nationale sud-africaine, Bafana Bafana, et des pays participant au Mondial 2010, le 9 juin 2010 à Johannesburg. (© AFP Mustafa Ozer)
publié le 11 juin 2010 à 0h00

Peter Alegi est professeur d’histoire africaine à l’université du Michigan (Etats-Unis) et de Pietermaritzburg (Afrique du Sud). Il est spécialiste du foot sur le continent africain et en Afrique du Sud, auquel il a consacré deux ouvrages.

Le football en Afrique du Sud a toujours été très lié au combat de la communauté noire pour ses droits. A-t-il encore un rôle social ?

Le Congrès national africain (ANC, au pouvoir) utilise désormais le foot, et particulièrement ce Mondial, comme un symbole. D’ailleurs, toute la réconciliation a été fondée sur des symboles : on se souvient de Mandela portant le maillot de l’équipe nationale de rugby lors de la Coupe du monde de 1995. Aujourd’hui, il faut vendre la «marque Afrique du Sud», attirer des investisseurs, les touristes. Le but non avoué de ce tournoi est de montrer combien l’Afrique du Sud est en avance sur les technologies, les transports… C’est pour cela qu’il fallait mettre le paquet sur les stades.

A propos des stades, en en bâtissant cinq, le pays n’a-t-il pas vu trop grand ?

Les stades sont magnifiques et risquent d'impressionner les téléspectateurs du monde entier. Enfin, on cessera de voir l'Afrique en guerre, rongée par la famine et les dictatures. Ça, c'est extrêmement positif pour le continent. Mais la grande question de l'après-Mondial est de savoir si ces stades seront économiquement viables. Il ne suffit pas de les construire, l'entretien coûte une fortune. Et à l'exception, peut-être, de Soccer City [à Johannesburg, qui accueillera le match d'ouverture et la finale, ndlr], je vois mal comment les stades du Cap ou de Durban pourront s'en sortir. Je ne parle même pas des petites villes comme Port-Elizabeth ou Nelspruit,