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Libération

A Mataffin, les gradins de la colère

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Route du Sud. Le road-movie de notre correspondante au cœur de la nation arc-en-ciel.
publié le 23 juin 2010 à 0h00

Même les coqs ne s’entendent plus chanter à Mataffin, ce petit village aux abords de Nelspruit. Dans ce township resté très rural, vaches et poulets vont allègrement de maison en maison. Mais, à quelques mètres de là, de l’autre côté de la rue, s’élève l’un des dix stades de la Coupe du monde. Pendant le mois de la compétition, entre les matchs, on y teste le son, on y organise des concerts. Question décibels, en se promenant dans le township en pleine journée, on aurait presque l’impression d’être dans l’enceinte du stade.

Le Mbombela Stadium de Nelspruit, à l’est du pays, fut construit de toutes pièces pour le tournoi. Il accueillera quatre matchs du Mondial. C’est tout. L’édifice a coûté 140 millions de dollars (114 millions d’euros) aux contribuables. Le coût humain a été bien plus important. Trois personnes au moins ont été assassinées pour une affaire de corruption relative au stade, et trois élus de la municipalité qui ont dénoncé les détournements de fonds ont été empoisonnés dans des circonstances douteuses. Les crimes ont été vite étouffés par la police, et la fête a pu commencer.

Zèbre. Au milieu de la savane s'élève aujourd'hui ce grand bloc de béton, soutenu par vingt-quatre piliers jaunes en forme de girafes. Pour les supporteurs amateurs de safaris, les 45 000 sièges du stade sont rayés de noir et blanc, imitation zèbre. Le stade pourrait rester dans la métaphore de la savane et devenir un «éléphant blanc», une construction qui ne servira à rien