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Le township où les touristes dégustent

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Au Cap, dans le quartier populaire de Gugulethu, des barbecues géants très prisés se tiennent à la cantine M’Zolis.
par Arnaud BERTRAND, Envoyé spécial au Cap et Thomas Lacondemine
publié le 5 juillet 2010 à 0h00

Contre sa poitrine, Sixolile tient fermement un seau en plastique recyclé. A l'intérieur, des côtes d'agneau et du mealie pap, une semoule de maïs roborative et bon marché. Une heure qu'il attendait patiemment son tour, coincé dans une interminable file d'attente entre un Brésilien et un Australien. La Coupe du monde n'a pas changé ses habitudes : chaque dimanche à l'heure du sermon, Sixolile vient à la cantine M'Zolis acheter le déjeuner pour la famille. Il vit à quelques mètres, à Gugulethu, un township noir de 170 000 âmes à 15 kilomètres du Cap. Depuis une dizaine d'années, le dimanche c'est jour de braai (barbecue en Afrikaans). Le principe est simple : tu achètes ta barbaque crue, tu l'emmènes aux cuistots et tu attends. Un ordre immuable, été comme hiver.

Une épaisse fumée s'élève au-dessus du township. Avec le Mondial, les vieux grils noircis par le charbon brasillent tous les jours. De 9 heures à 21 heures, non-stop. Dans l'embouteillage devant l'entrée du M'Zolis se mêlent la jeunesse branchée et bien apprêtée du centre-ville et celle du township. «M'Zolis est une oasis au milieu du désert. C'est le seul endroit du Cap où les gens peuvent venir dans un township sans la peur au ventre. Si tu as mal au ventre, c'est parce que tu as faim», raconte Nkhensani, une jeune noire venue de Khayelitsha, le plus grand township de la «Mother's City».

Symbole. Le M'Zolis agit comme un aimant. 3 000 à 5 000 personnes arrivent en bus ou en