Penser à la retraite quand on est coureur cycliste est une vraie destinée de bagnard. C'est pourquoi le coureur cycliste se recycle souvent dans le commentaire. Fignon y excellait. Mais à la fin, pour être franc, on ne l'entendait plus. C'était comme un sifflement douloureux à l'antenne. Pourtant il a continué jusqu'au bout. Le seul remède à la maladie était pour Fignon le surmenage. Affaibli par le cancer du pancréas qui avait été diagnostiqué l'an dernier au moment même où sortait son livre coécrit avec Jean-Emmanuel Ducoin : Nous étions jeunes et insouciants. Le double vainqueur du Tour a continué à commenter l'épreuve pour France 2 et Europe 1.
Pour lui la retraite sportive qu'il avait prise en 1993 tuait son homme. Mais c'est le cancer qui l'a eu, hier. Fignon, vu l'an passé à l'occasion de la sortie de son livre, racontait que sa santé de fer lui avait permis de faire carrière dans ce sport ingrat et pénible. Jamais malade, jamais un rhume. «Juste un ver solitaire», se marrait-il. Oui, mais un ver digne d'un double vainqueur du Tour : «Deux mètres ! Je croyais que j'avais perdu mes boyaux. J'ai tiré dessus, mais il a cassé.»
La mort de Fignon ferme aussi la porte sur un monde qui n'était pas totalement à l'époque sous EPO, sous sang oxygéné et hormones de croissance mais qui marchait tantôt aux pastilles bleues tantôt aux rouges. Un monde folklorique et follement drôle où on lavait son linge en famille avec les slips et les chaussettes dans la