Ils appellent ça «hacer la luna». Faire la lune, profiter de sa lueur. Pour toréer à la dure en douce. Les toreros furtivos vont braconner des passes à des vaches, voire des toros, la nuit, en cachette. Vieille lune. Dans ses Mémoires, Juan Belmonte raconte comment, les nuits de pleine lune, il se déshabillait pour traverser le Guadalquivir à la nage et, avec son veston, toréer nu des toros dans les élevages proches de Séville. Dans les années 50, El Cordobés fera de même du côté de Cordoue. Chez l'éleveur Félix Moreno, il estoquera un étalon avec une vieille baïonnette.
A cause de ce braconnage délictueux, Curro Romero a connu le cachot à Badajoz en 1970. Lors d'une corrida, il avait refusé un toro jugé par lui intoréable. Il avait vu qu'il avait été movido, déjà toréé. Paco Ojeda, à la fin des années 70, a forgé dans l'exercice son esthétique du toreo collé au toro : il fallait garder l'animal dans le petit périmètre de lumière, qu'on le voie charger sans le laisser filer dans le noir.
Queues coupées. En janvier, des ganaderias d'Estrémadure et de Castille-et-Léon ont reçu la visite de ces furtivos dans ce que José Luis Castro Jañez, président de l'Association des mayorales, appelle «une vague de vandalisme». Dans la propriété Fuente Santa, près de Cáceres, des furtivos ont réussi à isoler 18 vaches dans la plaza de tienta pour s'en servir. Dans celle d'El Madroñal, ils ont pu enfermer trois toro