Quelque chose ne va pas dans les proportions de ce corps d’athlète. Mais il en est de même pour tous les corps de sportifs de haute compétition. Biceps hypertrophiés des tennismen, cuisses de taureau des coureurs du 100 mètres. Dans un registre cousin, il n’y a rien de plus chaotique et noueux qu’un corps de danseur au repos.
Florent Manaudou est un nageur. Ce qui a gonflé en lui, ce sont ses épaules et son buste. Sa tête - qui, elle, n’a pas (encore ?) gonflé - paraît par contraste un peu réduite.
Il semble, malgré tout, comme descendu d’une publicité pour les crèmes épilatoires, un gel à cheveux, ou pour n’importe quelle pornographie propagandiste vantant le surhomme fasciste ou stalinien, voire un rêve de hardeur hongrois. Bandant sûrement pour ceux et celles à qui il ne faut pas grand-chose pour bander. N’étaient plusieurs détails qui contrarient la soi-disant perfection plastique, désagrègent l’érotisme et qui, du coup, rassurent. Les mains, par exemple, fines et longues, évoquent plutôt le pianiste. Et puis surtout, la vision, voulue par le photographe, d’un corps coupé, privé de sa moitié inférieure.
Florent Manaudou pose à poil, c’est-à-dire en tenue de travail. Pourtant, on ne saura jamais, même en se penchant sur l’image pour essayer de voir, s’il avait enlevé le bas ou conservé un de ces maillots de compétition si infimes que cela revient presqu’au même effet de nudité.
Ce portrait, qui ne cache pas qu'il est une peinture de facture classique, invite à bien des songes