Ils ne sont pas amis. Ils ne sont pas ennemis. Ils sont dans un entre-deux fait de respect et de crainte. Michal Martikan, un Slovaque taciturne, nerveux et légèrement taiseux, et Tony Estanguet, le grand béarnais, beaucoup plus prolixe. Ces deux céistes à la navigation fluide ont animé pendant dix-sept ans le canoë de descente. A l’image d’un duel Carl Lewis-Mike Powell en athlétisme, ou d’un Borg-McEnroe en tennis.
Techniquement, tout les oppose. Le Slovaque pagaie à gauche. Il est puissant, doté d’un culot monstre et d’une confiance inébranlable. Le Français pagaie à droite. Il est plus fin dans la navigation, plus en maîtrise et en anticipation. Au niveau des palmarès, leur duel équivaut à un quasi-match nul. Trois titres à deux pour Estanguet aux JO, quatre titres à trois pour l’homme de Zilina aux championnats du monde.
Des miettes pour les adversaires
A eux deux, ils ont écœuré une génération ou deux de céistes talentueux, ne leur laissant que des miettes. Robin Bell l’Australien, Ander Elosegui le Catalan, ou Stefan Pfannmöller l’Allemand se partagent de rares titres. Car, lors des grands rendez-vous, les deux compères raflent tout. Aux Jeux d’Atlanta, en 1996, Michal Martikan, tout juste 17 ans, bat Patrice Estanguet, l’aîné de la fratrie paloise, alors star des slaloms. Première médaille d'or de l'histoire de la jeune Slovaquie.
A Sydney, c'est Tony Estanguet qui se présente face au tenant du titre. Victoire du tricolore. A la fin de la course, il approche son adversaire pour le consoler : «Tu as