On ne prend pas le Ventoux, on est pris par lui. C’était vrai avant, de ces temps immémoriaux où le dopage salissait le cyclisme. Depuis hier, au cours d’une ascension où les coureurs meurent au galop au pied du Ventoux, comme dans un tableau de Delacroix, un cavalier assis sur sa selle, pas un cycliste, remporte l’étape à la moyenne de 41,72 km/h. Dans le genre jamais-vu, un cycliste dialogue avec son équipe par l’oreillette, afin de passer commande de cartes de visite : «Christopher Froome, coureur moyen, devenu champion.» Papoter dans une ascension, c’est faire monter de dix ses pulsations cardiaques. Doit-on parler d’une griserie absurde de plus ?
Comment qualifier hier cette victoire insensée de Froome au sommet du Ventoux ? Est-ce à dire qu'un jour l'affaire éclatera comme une chaudière à vapeur ? Le mont Ventoux a été la Bourse aux malheurs, un entrepôt d'anecdotes avec les fameux morceaux d'anthologie placés sous vitrine. Le 100e Tour a-t-il été achevé par un bout de météorite tombé de la Sky ? Froome, que l'on disait entamé, a tout raffermi : son empire, son administration, son aristocratie, sa fortune et son prestige. «Ce fut pour moi une ascension historique», dit-il 50 minutes après avoir coupé la ligne, alors que Hivert (Sojasun) en terminait. Et Froome, qui possède désormais 4'14'' sur Mollema et 4'25'' sur Contador, de poursuivre : «J'ai fini tout à bloc. Merci à mon équipe qui a été à 110% et aussi un merci immense au public. Il fallait