Le 15 avril 1993, vers 21 heures, au moment où les relecteurs du journal ploient sous les fautes d'orthographe de leurs égotiques collègues rédacteurs, les directeurs de Libé devaient en tenir une bonne. Le rosé, voire, à l'époque, le whisky… En manchette, le lendemain matin : du basket ! Hein ? Oui, du basket, le sport où on balance la grosse baballe orange dans un cercle de corde pendant quarante minutes…
Deux mots cicatrisent la une : «Magic Limoges.» Certes, il n'y a que le basket pour permettre d'accoler cette épithète au nom de la capitale de la porcelaine. La veille, dans le bien nommé stade de la paix et de l'amitié d'Athènes, le Limoges Cercle Saint-Pierre (CSP) brise le Trévise du légendaire Toni Kukoc (59-55), et devient champion d'Europe. C'est l'unique sacre du basket tricolore. La méthode ? Celle d'un entraîneur serbe, Bozidar Maljkovic, qui ferait passer pour mielleux n'importe quel sous-officier des Tigres d'Arkan. A prononcer en rrroulant les r : «Courir, courir, courir.» Et, accessoirement, après six heures d'efforts, boire un peu d'eau fraîche. Frédéric Forte, l'intercepteur en 1993, souffre encore quand il se souvient des séances de «Boja» : «C'était terrible, on enchaînait dix 400 m, dix 300 m, dix 200 m, dix 100 m, dix 50 m.» N'empêche, c'est Forte himself qui vola le ballon de la gagne des mains du géant Kukoc, 2,10 m.
Si Limoges suscita une telle sympathie, c’est que même les plus finauds des pronostiqueurs n’avaient