Günther Gebauer est philosophe, linguiste et scientifique du sport à l’Université libre de Berlin.
Un pronostic pour le match ?
A mon avis, les deux équipes sont à égalité. Les Allemands sont prêts à affronter les Français, ils ont l’impression de bien les connaître. L’Allemagne a un avantage, l’équipe est plus homogène. Les Français ont un handicap : comme toujours chez eux, tout dépendra du mental. Mais les Allemands seront plus fatigués d’avoir joué les prolongations face à l’Algérie. Et puis l’Allemagne n’a plus la force des grandes équipes historiques. L’équipe n’est plus celle de 1982 ou 1986. Si le match tourne mal, elle sera moins résistante.
1982 ou 1986 justement : qu’est-ce que ces deux matchs représentent aujourd’hui pour les Allemands ?
En Allemagne, il n'y a pas de mémoire collective de ces matchs. Le match de 86 [une demi-finale qui tourne à l'avantage de l'Allemagne, ndlr] a été purement et simplement oublié. Le match de 82 a été refoulé. Les Allemands ne sont pas fiers de ce qui s'est passé. Bien sûr, les fans les plus âgés, la presse, se souviennent des méfaits de l'équipe d'Allemagne à l'époque. Mais globalement, les gens ne comprennent pas comment Schumacher a pu se comporter ainsi [le gardien allemand percute violemment et volontairement le Bleu Battiston, qui reste inconscient]. Dans un premier temps, après le match, en Allemagne, on ne s'est pas vraiment rendu compte de ce qui s'était passé. Ou on n'a pas voulu s'en rendre compte. Il n'y avait que la joie d'avoir vaincu les Français, qui étaient les meilleurs, avec une équipe légendaire autour de Platini ou Battis