Menu
Libération
Décryptage

Les caïds du Top 14 à la peine

Le cap de la mi-saison de rugby à peine franchi, plusieurs des favoris galèrent. Passage en revue.
publié le 2 janvier 2015 à 19h26

Le foot français passant comme chaque année Noël au coin de la cheminée (ou à Maurice), le rugby a pris l'habitude d'occuper le terrain pendant les fêtes. De l'art de convertir une contrainte de calendrier pansu, a fortiori à neuf mois de la Coupe du monde, en bingo médiatique, comme les huit heures de direct, le week-end dernier sur Canal +, et on remet ça samedi après-midi. Avec, en prime, des stades joviaux malgré la froidure. La mi-saison tout juste franchie, on retient que le Top 14 ressemble à un furieux champ de mines (pas toujours réjouies), symbolisé par exemple par Oyonnax (9e) qui, à une victoire ou une défaite près, squatterait le top 6 cénaculaire ou figurerait parmi les relégables en Pro D2 ! Une conjecture qui éclaire sur les caprices d'un championnat où la sérénité n'est plus la mieux partagée des notions.

Au cours des deux saisons écoulées, les six mêmes clubs (Toulon, Clermont, Toulouse, Montpellier, Castres et le Racing) ont accédé aux phases finales. Or, même s’il reste 84 matchs à disputer - et à peu près autant d’occasions de se déjuger -, on peut déduire que l’adage «jamais deux sans trois» ne se vérifiera pas, avec ce tour d’horizon des gueules de bois du moment.

Toulon (2e) privé de bûche, pas d’embûches

Certes, nul ne songera prédire une bérézina au champion de France et d'Europe en titre, à l'effectif suffisamment maousse pour esquiver le coup de grisou. Le week-end dernier a cependant été saumâtre, avec la rouste prise à Paris contre un Stade français sur un nuage. Avec plusieurs titulaires varois au repos et 14 points encaissés dans le money time, le score (30-6) ment un chouïa. Mais il n'en a pas fallu plus pour que le manager Bernard Laporte sucre le repos auquel aspiraient des joueurs qui sont pourtant apparus lessivés, à l'instar de Mathieu Bastareaud dont la confession cathodique à chaud, larmes à l'appui, a jeté un froid : «Je suis un zombie. Je pense que, là, je suis arrivé au point de rupture. A un moment, il faut savoir dire stop.» L'occasion de se souvenir que derrière le bulldozer de 120 kg se cache un être complexe qui n'a jamais fait mystère de ses tourments.

Toulouse (7e) bégaie

Engluée en milieu de tableau, l’équipe la plus prestigieuse et fiable de ces vingt dernières années déconcerte. Après sa série de cinq défaites à la fin de l’été, elle a colmaté la brèche, y compris en coupe d’Europe, mais avance quand même balin-balan : vaincu à Montpellier (où il a failli gagner), puis vainqueur contre le Racing Métro (après avoir failli perdre), le Stade toulousain impose toujours le respect, mais ne fait plus trembler. Malgré une garnison cumulant un nombre étourdissant de sélections internationales, il souffre du fait que la plupart des tauliers ont leurs plus belles années dans le dos… et que la relève choisit de faire monter les enchères ailleurs que sur les bords de la Garonne. Conséquence (ou cause ?) : dans un club longtemps perçu comme un parangon de stabilité, les coulisses bruissent de tensions entre Guy Noves, le manager, et le président, René Bouscatel. Entre sous-entendus, démentis et consensus de façade, personne ne veut déterrer la hache de guerre, préférant tenter de sauver les meubles. Mais au prochain trébuchement…

Montpellier (8e) dans la tourmente

«Je pense qu'il est très heureux. On communique bien, il y a beaucoup d'harmonie dans notre relation.» Cela, c'était fin septembre, à l'heure des mots bleus de Mohed Altrad, président de Montpellier, pour son entraîneur Fabien Galthié… Qu'il a fait gicler trois mois et quatre jours plus tard, lundi, pour cause de «situation d'urgence», appelant au chevet d'un groupe à la dérive l'ex-sélectionneur de l'Afrique du Sud Jake White. Ainsi a tranché la 61e fortune de France, qui claironnait en début de saison l'ambition de décrocher un titre (le fameux retour sur investissement) : pour l'Europe, c'est cuit, et pour la France, quasi. De stratège redouté à tricard, Galthié découvre la fracture… A rapprocher de celle du tibia, le 12 octobre contre Oyonnax, de l'ouvreur François Trinh-Duc - sans qui le MHR ne fait plus que perdre. Un aléa qui, sur le coup (dur), avait échappé à Galthié : alors si omnipotent, l'Ibra de l'Hérault avait séché le match pour filer cinq jours à Rio faire la fiesta avec Serge Kampf, grand argentier de l'ovale.

Castres (14e) à la ramasse

Champion en 2013 et finaliste 2014, le Castres olympique du nez à une infamante dernière place. Le tycoon local Pierre Fabre est mort il y a un an et demi ; le tandem d’entraîneurs-chamans Labit-Travers a migré vers le nord (Racing), emportant dans ses valises des joueurs aussi essentiels que Dulin ou Claassen. Résultat : c’est encore un peu du rugby de sous-préfecture qui s’effiloche. On n’en est pas au syndrome Béziers ou Dax ; mais dans le Tarn chacun sait que l’an dernier, deux citadelles (Biarritz et Perpignan) ont été démantelées.