Il faudra vous y faire : Philippe Saint-André (PSA), c’est le Nétanyahou du rugby. Tout le monde le donne perdant ? Paf ! Il explose les Italiens 29-0 chez eux, dimanche dernier. Les Transalpins étaient transparents et les Bleus peu convaincants ? Qu’importe, Fifi, c’est notre Bibi à nous qui, quand il perd, oppose aux critiques le mur de ses propres lamentations - à vous faire chialer un footeux brésilien.
Alors voilà, contrairement aux balivernes écrites ici et justifiant moult flagellations, avançons que le XV de France aborde en position de force la dernière manche du tournoi, samedi à Twickenham (18 heures, l'heure du tea, ou de la stout, en ce qui nous concerne). Car la French Force a remplacé le French Flair, nous glisse le Guardian, qui voit juste. Les Bleus ont une mêlée et une défense, ils plaquent avec amour ; OK, ils ratent leurs passes et laissent tomber des ballons, alors que les Anglais les font rigoler, mais on s'en fiche : «Quand je vous dis qu'on avance, qu'on peaufine, glissait le vice-président de la Fédé, Serge Blanco (alias docteur Coué, co-coach, tuteur, mentor et contradicteur de PSA) vendredi à l'Equipe. On n'est pas dans la récolte définitive, mais dans la progression.»
Jusqu'où ira-t-elle ? Philippe Saint-André, en poste depuis 2012, a indiqué lundi qu'il y a de «grandes chances» pour que cet England-France constitue sa dernière apparition dans le tournoi. Mais le manager des Bleus est sous contrat jusqu'au Mondial 2015, qu'il compte remporter. Le XV de France doit donc tout gagner d'ici là. Comme ça, Saint-André s'en ira plus facilement. Parce que juqu'ici, plus il perd, plus il reste, et il détient les plus mauvaises stats de l'histoire (15 victoires en 36 matchs, 41,7% de réussite).
Marmite. Mais au-delà de son cas, le «crunch» du jour s'annonce aussi salivant qu'une tartine de Marmite au breakfast. Parce que derrière l'Angleterre, l'Irlande et Galles au coude-à-coude (6 points), la France (4 points) peut encore gagner le tournoi. Certes, il faut que l'Irlande perde en Ecosse et le pays de Galles en Italie, pendant que les Bleus l'emportent de plus de 8 points. Aussi probable qu'un FN à 5% dimanche, diront les pisse-froid. Mais les sondeurs se plantent, n'est-ce pas Bibi-PSA ?
Et les rêves ne valent que s’ils semblent inatteignables, selon notre barman préféré, qui remet sa pinte pour saluer le forfait de Camille Lopez. Ce gaillard sympathique mais décevant restait titulaire car PSA n’osait pas s’en séparer. Comme son genou, moins têtu que le coach, a lâché le Clermontois, voici qu’à l’ouverture réapparaît Jules Plisson. Nul ne s’en plaindra. Sauf ceux pour qui la charnière inédite qu’il formera avec Sébastien Tillous-Borde, la seizième testée par Saint-André, montre qu’il cherche toujours la bonne formule - comme nous tous sur cette Terre.
Plisson a deux avantages. A sa première pige chez les Bleus, en 2014, il avait mené à la victoire contre… les Anglais (26-24). Et de son récent voyage comme remplaçant à Rome, le jeunot à gueule d’ange est revenu avec un nez cassé : ça vous patine un rugbyman juste ce qu’il faut à l’heure du bourre-pif au pays du cricket. Où treize des vainqueurs de Rome seront sur le terrain, motivés par le désir pour l’ovalie de faire aussi bien que le foot, ce sport de manchots qui a bouté les mangeurs de porridge hors des coupes européennes.
morphologies. Mais les Bleus lutteront-ils à armes égales ? That's the question. Car sur les 15 derniers cas de dopage britanniques, 13 concernaient le rugby (à XV ou à XIII). L 'agence antidopage Ukad s'inquiète. L'usage de stéroïdes «a explosé» chez les ados qui veulent se faire du biscoto dès 14 ans pour imiter les morphologies délirantes de leurs aînés, a indiqué la patronne de l'Ukad, Nicole Sapstead, au Guardian : «Une augmentation dramatique. Les stéroïdes sont si faciles à obtenir sur Internet.»
Ce n'est pas en France qu'on verrait ça. Le French Rugby carbure à l'orgueil fouetté, au désir de renverser la table, à la nétanyahouisation des esprits et des corps, et à un brin de provoc, tel Philou le filou lançant, jeudi, façon cirage de shoes : «Les Anglais sont grands, favoris, exceptionnels, ce sont les meilleurs joueurs d'Europe.» Histoire de les enfumer : vous aviez capté, z'êtes pas British. Et le loustic en a remis une louche : «On va juste arriver avec nos convictions, nos qualités, pour faire un grand match de rugby.» Bon, t'enflamme pas quand même… Mais c'est qu'il y a du grand Charles dans ce petit Saint-André. Samedi, il va nous lancer l'appel de Londres et, le 31 octobre, ses grognards résistants soulèveront la World Cup à Twickenham. On parie ? Euh… Juste un fish and chips, alors.