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Libération
Éditorial

L’avenir flottant de Roland-Garros

Roland-Garros 2024dossier
Pourquoi il faut laisser la pluie continuer à entretenir l'incertitude du tournoi.
Il pleut. (Photo AFP)
publié le 3 juin 2015 à 20h16

Peu importe le vainqueur, nous aurons eu un Roland-Garros 2015 à rebondissements : un article people du site officiel du tournoi sur Stan Wawrinka qui provoque la colère de ce dernier ; un selfie qui agace (sacrilège absolu) Roger Federer; une tôle qui tombe sur des spectateurs (sans faire de blessés graves heureusement), de vraies engueulades style McEnroe, Tsonga en demi-finales… On n'avait pas vu autant d'«animation» depuis un long moment dans l'étape parisienne des tournois du Grand Chelem. D'habitude, tout est plié d'avance : les Français perdent en début de deuxième semaine et redeviennent suisses, on sait par avance quels joueurs iront dans le dernier carré et à la fin Nadal gagne…

Finalement, le seul élément qui peut mettre un grain de sable dans les rouages de cette organisation militaire, c’est la pluie. C’est elle qui perturbe la préparation millimétrée des champions. C’est sa présence ou son absence qui va changer les conditions de jeu, la texture de la terre battue et favoriser les attaquants ou les spécialistes de la relance. C’est encore elle qui fait fuir les spectateurs endimanchés pour laisser place aux vrais accros emmitouflés qui préfèrent grelotter de froid plutôt que de rater un seul échange. Et c’est surtout elle qui va interrompre un match plié pour redonner une seconde chance au battu d’avance. Souvenez-vous en 1991, un Andre Agassi triomphant en début de finale avant la pluie se fait battre par Jim Courier qui revient sur le court après l’interruption en ayant changé de tactique. Le même Andre Agassi en perdition en finale 1999 face à Andreï Medvedev profite d’un break provoqué par une averse pour se requinquer, et gagner enfin son premier Roland-Garros.

Et maintenant, on voudrait nous construire un nouveau Roland-Garros avec un toit qui protégera les joueurs des aléas météorologiques, et qui nous prémunira contre les accidents de l'histoire. Roland-Garros doit rester le dernier tournoi du Grand Chelem à ne pas passer entre les gouttes.