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Portrait

Tour de France : tranquille comme Barguil

publié le 17 juillet 2015 à 19h56

Une chute causée par une musette de ravitaillement et une collision avec une vache pyrénéenne, évitée de justesse. Tel est le passif de Warren Barguil après deux semaines sur son premier Tour de France. Des trois meilleurs espoirs du cyclisme français, Barguil le Breton est celui qui sort du lot cette année. Il est 11e du classement (et deuxième tricolore derrière Tony Gallopin), à près de dix minutes du maillot jaune.

Barguil, 23 printemps, semble traverser l'événement avec détachement. A l'issue du contre-la-montre par équipes dans le Morbihan, il dressait le bilan d'une première semaine vécue en relative sérénité : «Mon Tour est déjà réussi. S'il s'arrêtait demain, je n'aurais pas de regrets.» Barguil mêle décontraction bonhomme, fraîcheur authentique et bons mots calibrés.

Avant cette année, il n'avait jamais vécu de l'intérieur le grand cirque de juillet, ni eu le droit à l'attention, parfois démesurée, des médias. «Les gens n'ont pas placé sur moi les mêmes attentes qu'envers Thibaut [Pinot] et Romain [Bardet], expliquait-il lors de la journée de repos. Cela m'a permis de faire mon truc dans mon coin.»

En 2012, il est en contact avec la FDJ, mais ses entraîneurs lui conseillent de patienter une année de plus en amateur et se faire la main comme leader. L'année suivante, le deal se fait dans la formation néerlando-allemande Argos-Shimano, devenue Giant-Alpecin. Marc Madiot, patron de la FDJ et de la Ligue nationale de cyclisme, est furibard de le voir quitter la France. La pilule a d'autant plus de mal à passer que Barguil est entraîné par Julien Pinot, frère de Thibaut. «Il me manque, souffle le grimpeur. C'était mon confident.» Ses débuts pros sont balisés : pour le Tour, l'équipe mise d'abord sur ses sprinteurs Marcel Kittel et John Degenkolb. En 2013 et 2014, la Vuelta. Bilan : deux victoires d'étape la première année, une septième place au général celle d'après. En 2015, le voilà mûr pour le grand raout. Mais ce fils d'un ancien coureur sait qu'il est encore trop tôt pour viser une bonne place sur les Champs-Elysées.

Barguil est presque déconnecté du vélo scientifique incarné par la Sky : «Les coureurs comme Froome n'ont pas la même philosophie du vélo que moi. J'ai envie de profiter de mon entourage, de voir grandir mon neveu. Je n'ai pas envie de regretter parce que j'ai fait du vélo comme un gros con.» De toute façon, il jure ne pas se mettre de pression démesurée : «Petit, je ne me suis jamais dit que j'allais passer pro.»