Comme si Mondrian renaissait de ses cendres pour échanger le support de la toile contre un terrain de basket. En toute objectivité, le playground tout juste rénové du 22, rue Duperré, dans le quartier parisien de Pigalle, est une pépite en matière de street-art. Refait une première fois à neuf en 2009, le site vient d'être rehaussé de formes cubiques — rappelant les compositions quadrillées de rouge, jaune, bleu et blanc de l'artiste peintre —, auxquelles se superposent les courbes fixant le rond central et les lignes de tir.
Stéphane Ashpool est le créateur de la marque parisienne Pigalle, qui a récemment remporté le prestigieux prix de l’Andam récompensant les jeunes créateurs de mode. Féru de basket-ball, il organise chaque année un tournoi sur ce terrain non-homologué par la Fédération internationale de basket-ball.
Le site, ayant déjà fait l’objet d’une pétition pour nuisances sonores et autres bricoles, a été fermé en janvier, sur fond de plan Vigipirate et par manque d’effectif pour assurer ouverture et fermeture, ainsi que par besoin de remise aux normes. C’est pourquoi Stéphane Ashpool et plusieurs autres ont décidé de rénover l’espace avec le soutien financier de Nike, aussi sponsor des tournois annuels.
Le terrain avant rénovation, vu sur le Twitter de @François_J (Photo François Justamente).
Aux commandes de la direction artistique du projet, le studio de création Ill, proche de la marque Pigalle. Thomas Subreville, cocréateur du studio, précise d'ailleurs que plutôt que de se référer à Mondrian, la ligne artistique se rapprocherait du travail de Malevitch, peintre russe du début du XXe siècle. Mais outre les influences, «le vrai challenge était de créer une œuvre d'art fonctionnelle en respectant les règles inhérentes au basket-ball», souligne-t-il.
Lifté, oui, mais également remis aux normes. Malgré les parois obliques et un escalier sorti de nulle part, les cotes sont respectées et de nouveaux paniers homologués ont été installés. Et pour aller plus loin, Vincent Le Thuy, coordinateur du projet, confiait récemment à Télérama «qu'une gomme en caoutchouc qui absorbe le bruit du ballon» avait été posée au sol pour remédier aux éventuelles nuisances sonores.
La mairie du IXe arrondissement de Paris, propriétaire du terrain, se félicite de l'initiative prise par Pigalle, notant une baisse significative des plaintes des riverains concernant l'espace et ses usagers. En plus d'avoir impulsé la rénovation, des membres du collectif parisien viennent même assurer les horaires d'ouverture du week-end. Nike, qui a financé l'opération, n'en est pas à son premier coup d'essai en terme de rénovation de structure parisienne. Avec l'inauguration par Michael Jordan en juin d'un lieu semblable flanqué du logo sur son enceinte dans le XXe arrondissement de Paris, les onze autres terrains de basket publics de la capitale sont en proie à la concurrence.