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Libération
EDITORIAL

Bianconero

publié le 29 juillet 2015 à 19h46

La nostalgie est mauvaise conseillère. Pour toute une génération, passionnée ou pas par le foot, le nom de Michel Platini sent bon la France des années 70 et 80. Avec tout ce que cela fait naître en madeleines de Proust ou en «bien belles images comme on aimerait en voir plus souvent». Avec lui, il y en a un paquet : ses coups francs tirés au-dessus des mannequins en mousse pour s'entraîner, son passage chez les Verts, le romantisme de la demi-finale perdue face à l'Allemagne en 1982, ses neuf buts à l'Euro 84, son côté mauvais joueur, ses vannes, sa passion pour le jeu intacte à 60 ans, sa bataille pour le fair-play financier, une oasis de modération dans un sport pourri par le fric, ses kilos en trop… Alors forcément, «Platoche», on l'aime bien. Mais comme tous les grands joueurs, il a son côté obscur. La caisse noire de Saint-Etienne, mais aussi le drame du Heysel. Platini capitaine de la Juve devra se justifier non d'avoir joué le «match de la honte», ce qu'il a fait avec intelligence, mais d'avoir laissé éclater sa joie en marquant le penalty de la victoire. On le sait, les grands joueurs sont aussi capables de mauvais gestes, même s'ils les font avec plus de grandeur que les autres. Quant à son bilan comme patron de l'UEFA, il est loin d'en faire le modèle de vertu dont le foot mondial a besoin pour remettre le jeu au centre. Deux exemples : le cadeau fiscal attribué aux structures chargées de l'organisation de l'Euro 2016 en France d'abord, puis son rôle d'agent d'influence dans l'attribution du Mondial au Qatar. A quoi ressemblerait une Fifa sous la présidence de l'ancien numéro 10 ? Plutôt Platoche ou plutôt Platini ? Sans doute entre les deux. «C'est un jeu qui n'a pas de vérité, qui n'a pas de loi, avait-il dit à Marguerite Duras. Qui n'a rien. Et on essaie de l'expliquer.» Tout un programme…