En noir, la meilleure troisième-ligne de ces dernières années, trois gaillards (Richie McCaw, Kieran Read, Jerome Kaino) qui pourraient jouer en tongs tant ils sont sûrs de leurs forces. En jaune, la horde sauvage, trois déments qui courent et plaquent dans tous les sens, créant l'une des plus jolies sensations de cette Coupe du monde. «Franchement, je ne les attendais pas à ce niveau, confie Imanol Harinordoquy, l'ancien colosse du XV de France. Scott Fardy a été à un niveau monstrueux sur la demi-finale, David Pocock a remué de la barbaque pendant toute la rencontre et gratté quatre ballons aux Argentins, et Michael Hooper a toujours une activité de folie.» Avec leur dégaine de groupe grunge du Queensland (barbe broussailleuse, regard habité ou cheveux longs), les compères ont réussi un tour de force : jouer sans numéro 8 (troisième-ligne-centre), un des postes-clé du rugby. Harinordoquy détaille : «En alignant trois flankers, ils ont moins de joueurs qui portent le ballon, et peuvent avoir un déficit en touche ou en mêlée. J'avais déjà vu ça, mais ce qui est rarissime, c'est de mettre trois joueurs qui ont un profil quasi identique. Voilà une belle inspiration de Michael Cheika, le coach australien Avec eux, il a construit un pack de combat, plus agressif, ce qui n'était pas forcément le point fort de l'Australie.»
A 35 ans, le Basque vit ses derniers mauls avec le Stade Toulousain et il est ravi de voir la finale basculer dans cette zone : «Les troisième-ligne des deux camps vont donner le tempo, on va voir qui prend l'ascendant, gratte ou ralentit les ballons adverses. Les Australiens essayeront de contraindre les Néo-Zélandais à consommer de nombreux joueurs dans les zones de rucks, joueurs qui finiront par leur manquer sur les autres phases. Je pense que les Blacks savent qu'ils vont tomber sur un os et ont bossé principalement sur ce point toute la semaine.» Ils pourront compter sur un Richie McCaw impeccable à l'heure d'honorer sa 148e sélection, sa 111e comme capitaine. Celui qui a «une thèse dans le pourrissement des rucks», dixit Harinordoquy, réalise une solide tournée d'adieux : «Il s'est bien adapté aux nouvelles règles, il est beaucoup plus vite sur ses appuis, n'est pas souvent pénalisé, il a fait une perf assez immense contre les Sud-Africains. Ses plaquages sont bien sentis, il est toujours là pour mettre les mains sur le ballon et gagner les deux secondes qui permettront à son équipe de se replacer défensivement.»