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Justice

Transferts suspects de l’OM : des agents veulent régler leurs comptes

Ce mercredi, la cour d’appel d’Aix-en-Provence doit se prononcer sur la saisie des comptes bancaires de deux agents majeurs du dossier, Karim Aklil et Jean-Luc Barresi, saisie effective depuis janvier dernier.
Jean-Luc Barresi en novembre 2012 au palais de justice de Marseille. (Photo Boris Horvat. AFP)
publié le 18 novembre 2015 à 9h36

Voilà un des épisodes les plus techniques, mais certainement pas le moins intéressant, du sinueux dossier des transferts de l’OM, né au printemps 2012. Ce mercredi, près de deux mois après la mise en examen de l’ancien président Jean-Claude Dassier, la cour d’appel d’Aix-en-Provence doit se prononcer sur la saisie des comptes bancaires de deux des agents majeurs de l’affaire, les Marseillais Karim Aklil et Jean-Luc Barresi.

Placés en garde à vue le 20 janvier dernier à l’Evêché, l’hôtel de police de Marseille, Aklil et Barresi avaient vu les sièges de leurs sociétés perquisitionnés et leurs comptes saisis par l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (Agrasc), sur décision du magistrat instructeur Christophe Perruaux. Une mesure qu’ils contestent vigoureusement, et qui sera décortiquée en appel.

Pour bien comprendre cette affaire, retrouvez ici notre enquête de septembre

«Mon client n'a pas été mis en examen, l'ordonnance est simplement motivée par un exercice présumé illégal de la fonction d'agent de joueurs sur deux transferts bien précis, l'arrivée de Souleymane Diawara à Marseille, en juin 2009, et le départ de Mamadou Niang à Fenerbahçe en août 2010», explique Me Pierre Bruno, qui défend Jean-Luc Barresi, cible principale des juges.

Barresi était détenteur de la licence d'agent FFF au moment des faits, Aklil ne l'a obtenue qu'en octobre 2009. «Mais j'étais associé avec quelqu'un possédant cette licence, plaide Aklil, et cette personne n'était pas une simple couverture d'ailleurs, nous avons bossé dans la même structure jusqu'en 2014. Des dizaines, des centaines d'agents en France ont fonctionné et fonctionnent encore ainsi. Le fond de l'affaire, c'est qu'on veut me voir dans la main de Barresi, alors que nous n'avons que ces deux transferts en commun, avec des contrats commerciaux en bonne et due forme.»

«Je n’ai jamais volé de ma vie, ne serait-ce qu’un chocolat»

Aklil ajoute : «J'aimerais que mes droits soient respectés, je ne suis ni mis en examen, ni placé sous le statut de témoin assisté, et mon argent est pourtant bloqué depuis dix mois sur ordre d'un juge. Cela m'empêche de travailler, d'avoir de la trésorerie, de voyager pour mon métier, d'avoir un salaire, de payer ma salariée. Je n'ai jamais volé de ma vie, ne serait-ce qu'un chocolat, et ma réputation se retrouve salie par toute cette histoire, je suis emmené en garde à vue devant mes enfants comme un simple vendeur de drogues. Il y a quelqu'un qui nous veut du mal.» Il ne citera pas de noms. Me Bruno n'aura pas cette mansuétude : «Les cibles de ce dossier sont les concurrents directs de M. Jean-Pierre Bernès, qui a une relation privilégiée avec les services de police et d'anciens collaborateurs de l'Elysée [époque Sarkozy, ndlr].»

Mis sur écoute au printemps 2012, Jean-Pierre Bernès, l'agent le plus puissant du football français, a été entendu deux fois par les enquêteurs de l'Office central de lutte contre le crime organisé (Oclco), lors d'auditions simples. La seconde a eu lieu le 17 novembre 2014, dans un cadre bon enfant, alors qu'au même moment, une fournée d'anciens et d'actuels dirigeants de l'OM (les présidents Pape Diouf, Dassier et Vincent Labrune, ou encore les DG Antoine Veyrat et Philippe Pérez) étaient placés en garde à vue. Idem en janvier 2015 pour tous les agents ou presque ayant travaillé avec l'OM entre 2009 et 2011, à l'exception encore notable de Jean-Pierre Bernès, pourtant agent de l'entraîneur olympien de l'époque, Didier Deschamps.

Margarita Louis-Dreyfus entendue en juin dernier

«Même Cyril Rool, ancien joueur de l'OM et grand ami de Deschamps, aujourd'hui collaborateur de Bernès, a fini en garde à vue pour expliquer sa résiliation de contrat de 2010, souligne une source judiciaire, étonnée par la capacité de Bernès à passer entre les gouttes. Lors d'une de ses auditions, Bernès a reçu les enquêteurs à l'hôtel Claridge, à Paris, alors que Margarita Louis-Dreyfus, propriétaire de l'OM et partie civile dans ce dossier, a dû se rendre à Nanterre, le 7 juin 2015, pour être entendue pendant trois heures au siège de l'Oclco.» Noël le Graët, le président de la FFF, et Frédéric Thiriez, le boss de la LFP, ont aussi été entendus comme témoins dans ce dossier mouvementé.