Il arrive, une feuille volante à la main, à son en-tête et avec «votre Sepp Blatter» en signature. Et se presse de la distribuer aux présents ; les Italiens de la Gazzetta dello Sport, les Espagnols du Mundo Deportivo et Libération : une dénonciation des agissements de la commission d'éthique, son œuvre, qu'il compare désormais «à l'Inquisition». Le président (suspendu) de la Fédération internationale de foot (Fifa) est d'excellente humeur ce mardi, quand il reçoit à l'hôtel Dolder Waldhaus en surplomb du lac de Zurich : une grande vivacité d'esprit, un maniement assez sûr du second degré et la petite histoire mélangée à la grande, bons mots compris - «Libération, c'est le nom de votre journal et c'est aussi ce à quoi j'aspire.» Sur l'OM : «J'ai assisté à un match au Vélodrome à l'époque où Didier Deschamps était l'entraîneur. Il y avait un très bon joueur argentin [Lucho Gonzalez, ndlr]. Aujourd'hui, les Marseillais sont déjà contents quand ils font un match nul.» L'empereur contre-attaque.
Allez-vous vous rendre jeudi à la convocation du Comité d’éthique de la Fifa ?
Bien sûr. J'ai été suspendu [le 5 octobre, pour trois mois, ndlr] sans être écouté, alors… Je veux me défendre. Remarquez, en principe, je n'ai pas le droit d'entrer dans les locaux puisque je suis suspendu [sourire].
Le porte-parole du comité d’éthique a annoncé vendredi dans l’Equipe votre probable condamnation…
Oui. C'est choquant. Comme il est choquant de voir fuiter dans la presse les conclusions de la chambre d'instruction du comité d'éthique [qui servent de base à la chambre de jugement, chargée d'énoncer le verdict], qui n'ouvrent que deux possibilités : deux ans de suspension et 160 000 francs suisses d'amende, ou suspension à vie. Il n'y a aucune confidentialité dans cette opération. Or, c'est un des points fondamentaux du code d'éthique : je le sais puisque j'ai créé ce comité d'éthique [en 2004]. Il est dit que, si ses membres manquent de confidentialité, la commission de discipline doit suspendre les personnes concernées.
Sur le fond ?
Je vais être très clair : dans le football, je n'ai jamais de ma vie fait quelque chose que je devrais me reprocher sur le plan de la conscience - on parle d'éthique - ou sur le plan du droit - on parle de pénal. Je peux aller devant n'importe quel tribunal avec la conscience tranquille. Si on voulait m'éliminer, on a failli réussir : le 1er novembre [date de son malaise], si je n'avais pas été aux urgences de l'hôpital de Zurich, où pratiquent de très grands médecins, vous auriez écrit mon épitaphe.
Comme vous le faites aujourd’hui, le président de l’Union européenne de football et candidat jusqu’ici empêché à la présidence de la Fifa, Michel Platini, s’est plaint de la malveillance de la chambre d’instruction du comité d’éthique. A quel jeu joue cette commission ?
Je ne sais pas si elle veut empêcher Michel Platini d’être élu président de la Fifa ou si elle veut me donner un coup de pied, à moi.
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