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Portrait

Tennis : Milos Raonic, une baraque du Canada

publié le 28 janvier 2016 à 19h51

Ses faux airs de Clark Kent (l’avatar civil de Superman à la mèche qui ne bouge jamais) qui aurait enfilé un short lui remontant jusqu’aux aisselles n’aident pas, c’est sûr. Son profil de machine à aces non plus. Pas plus que son visage aussi expressif que celui d’une statue de cire, que seule une petite langue tirée au moment de la frappe vient parfois déformer. Pourtant, le Canadien Milos Raonic gagne à être connu. Pas seulement parce que sa passion pour l’art contemporain pourrait bien faire entrer à l’avenir les interviews d’après-match dans une autre dimension, comme l’annonçait son exégèse des œuvres d’Andy Warhol et d’Ai Weiwei après sa qualification pour les demi-finales de l’Open d’Australie… Un ovni dans l’ordinaire du suiveur de la galaxie tennis !

Non, si Raonic gagne à être connu, c'est surtout parce qu'à 25 ans, il pourrait bien devenir le prochain numéro 1 mondial. Ça fait des années qu'on l'entend : actuellement 14e mondial, le natif du Montenegro a déjà été numéro 4 au classement ATP, mais des blessures à répétition l'ont freiné. En ce début d'une saison où il a gagné neuf matchs sur neuf, on sent comme un frétillement qui tendrait à indiquer que l'objectif n'est plus très loin. Car le garçon a progressé, et pas qu'un peu. Gaël Monfils, sa victime en quart de finale, balayé en quatre sets, peut en témoigner : «Il retourne beaucoup mieux que par le passé. Il joue beaucoup plus vite du fond du court, il frappe la balle vraiment très fort en coup droit. Il a même amélioré son revers, qui était jusqu'ici un peu son point faible

L'observation vaut également pour son déplacement : la manière dont il arrive à trimballer sa carcasse de 1,96 m est impressionnante. «Il y a un an, pendant sa préparation hivernale, il a perdu beaucoup de poids, note l'ancien numéro 1 Jim Courier. Il travaille pour être le meilleur possible, et ça se voit dans tous les secteurs de son jeu.»

Quand d'autres ont le talent ou le génie pour moteur, travail est le mot qui revient le plus souvent pour expliquer les progrès du canonnier de Toronto. Ainsi que son approche ultraplanifiée du métier. Courier, toujours : «J'aime le professionnalisme avec lequel il entre sur le court, j'aime sa vision du jeu, il est extrêmement discipliné, très concentré, il comprend parfaitement le tennis qu'il produit.» Et cela remonte à ses plus jeunes années jurent ceux qui le connaissent depuis longtemps. Milos Raonic s'est lui-même programmé pour réussir. Au point d'être devenu le nouvel empêcheur de tourner en rond du Big Four ? «Il est encore un peu trop tôt pour dire ça, tempère Courier. Mais ce qui est sûr, c'est qu'il est une menace sérieuse.» Et un adversaire dont Andy Murray devra se méfier grandement ce vendredi (1).

(1) Le vainqueur rencontrera en finale Novak Djokovic, vainqueur jeudi en demie de Roger Federer (6-1, 6-2, 3-6, 6-3).