Une nouvelle écurie, le retour de Renault à «temps plein» et un système de qualification genre roulette russe... Trois raisons de s'intéresser à la saison de F1, qui démarre ce week-end à Melbourne.
La nouvelle écurie Haas peut-elle tirer son épingle du jeu ?
Six ans que cela ne s’était pas produit : une nouvelle équipe, Haas, intègre le plateau cette année et elle apparaît bien plus sérieuse que les trois dernières à avoir tenté leur chance, de conserve en 2010. Team Lotus (qui devint par la suite Caterham), la petite équipe espagnole HRT et Manor (devenue Virgin Grand Prix puis Marussia avant de redevenir Manor au début de 2015 dans des conditions folkloriques), la seule à avoir survécu jusqu’au début de cette saison, s’étaient lancées dans le grand bain avec très peu de moyens, sur la promesse d’une réduction des coûts jamais concrétisée. HRT et Caterham ont fini par disparaître, en manque de liquidités.
Haas (du nom du patron, Gene Haas), à la base une société de fabrication de machines-outils fondée en 1983, est présent aux Etats-Unis, en Nascar, depuis 2002. Elle sera la première écurie américaine depuis Lola-Beatrice en 1986 (qui alignait alors le champion du monde 1980, l’Australien Alan Jones, et le Français Patrick Tambay). En F1 cette année, Haas jouit d’un budget d’environ 90 millions d’euros, contre 300 à 400 pour les plus grosses équipes. Elle sera motorisée par Ferrari, son châssis est produit avec l’aide de Dallara, constructeur historique de monoplaces en Europe, dont la dernière apparition en F1 avait eu lieu pour le compte de HRT, se soldant alors par une belle régularité... tout au fond de la grille.
Mieux dotée toutefois que la défunte équipe espagnole, Haas peut prétendre tutoyer le milieu de tableau d’ici quelques courses, d’autant qu’elle à débauché Romain Grosjean de chez Lotus, lequel ne devrait pas trop souffrir de la comparaison avec son équipier, le Mexicain Esteban Gutierrez, dont la présence en F1 est plus due à la fortune de son sponsor, son compatriote Carlos Slim, qu’à ses résultats. Lors des essais de Barcelone, les Haas ont rencontré différents soucis techniques, augurant de débuts difficiles.
Que peut espérer Renault ?
Et revoilà la firme au losange à 100% en F1. Nouvel épisode de sa série d’allers-retours avec la structure basée à Enstone, achetée à Benetton en 2000, revendue en 2010 au fonds luxembourgeois Genii Capital, estampillée Lotus jusqu’à la fin de la saison dernière, et donc à nouveau acquise, alors qu’elle était mal en point financièrement, pour un euro symbolique. L’année 2015 avait été marquée par une longue hésitation sur la politique à suivre pour le constructeur français, au vu des résultats décevants enregistrés depuis l’apparition des moteurs V6 turbo hybrides, début 2014 : se retirer complètement ou poursuivre une activité de simple motoriste.
Accablé de critiques par la principale équipe qu’il fournissait, Red Bull (aux côtés de sa petite sœur, Toro Rosso), avant même le premier Grand Prix 2015, il n’était guère envisageable pour le constructeur de poursuivre ce partenariat. Même si de fait, ce sont bien des moteurs Renault qui équiperont l’équipe autrichienne (qui n’a pas réussi à décrocher un Ferrari ou un Mercedes), mais rebadgés TAG, partenaire historique de McLaren, qui a migré chez la concurrence. Finalement, Renault a opté pour un retour total, non sans risques. Si ce choix offre une bien plus grande visibilité marketing, les résultats sportifs sont loin d’être garantis. Une place dans le top 5 au classement constructeurs constituerait un bon résultat, vu le niveau de la concurrence et le retard du moteur l’an passé par rapport à Mercedes et Ferrari. Côté pilotes, le jeune Danois Kevin Magnussen, qui avait entamé sa carrière par un podium à Melbourne il y a deux ans chez McLaren, lors de sa première course en F1, avant d’être évincé fin 2014, effectue son retour en fer de lance de l’équipe. A ses côtés, le novice britannique Jolyon Palmer, champion GP2 2014 et troisième pilote Lotus l’an passé, aura tout à prouver. A noter que les deux hommes sont tous les deux des fils d’anciens pilotes de F1 (Jan Magnussen et Jonathan Palmer), une première dans une même équipe...
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Qu'attendre du nouveau système de qualifications ?
Une saison de F1 ne serait pas une saison de F1 sans son lot de polémiques, de contestations des règlements techniques ou sportifs, d’affaires en tout genre. Ces dernières semaines, c’est la refonte du système de qualifications qui a occupé les esprits. Dans l’optique de pimenter le spectacle, Bernie Ecclestone a proposé et fait entériner par les instances de la discipline (Groupe stratégique, commission F1 de la Fédération internationale de l’automobile) une nouvelle procédure qui transforme l’exercice en chaises musicales: le principe des trois temps est maintenu, mais au cours de chaque partie (Q1, Q2, Q3), après quelques minutes, le pilote détenteur du dernier temps est éliminé.
Ensuite, le couperet revient toutes les quatre-vingt dix secondes. Autant dire que la part de la stratégie diminue et que le droit à l’erreur se réduit. Mais peu de temps après le choix de ce règlement, fin février, l’habituel festival des contradictions a commencé. Ecclestone a annoncé qu’il ne pourrait entrer en vigueur avant le Grand Prix d’Espagne, pour des raisons de mise en place technique. D’autre part, Ferrari, pourtant partie prenante du processus décisionnaire au départ, l'a ensuite vertement critiqué. Finalement ce nouveau format a bel et bien été entériné et sera appliqué dès Melbourne ce week-end...
Quant aux pilotes, ils semblent peu goûter l'exercice. Ainsi, Fernando Alonso déclarait-il à la radio espagnole COPE : «[Les audiences] baissent dans tous les pays et donc ils pensent à de nouvelles choses en permanence pour regagner de la popularité. Mais plusieurs des choses auxquelles ils pensent sont folles, comme le nouveau système de qualifications, qui est plus complexe que celui que nous avions. Nous donnons des migraines aux fans.»