A Gand, où il est confiné depuis mardi, avec vue sur les canaux et les façades en briques, Toms Skujinš bout à grosses bulles. «Il faut que je sorte d'ici. Moi, il me faut la campagne !» implore le coureur letton. Il lui tarde d'entamer le Tour des Flandres, avec ses chemins de charroi, l'odeur de tourbe et de bière. «Ce sera une fête de village, dit-il à Libération. C'est ça, le cyclisme : de la passion. Personne n'est là pour l'argent, pas même nous, les coureurs.» En tout cas pas lui, un équipier de 24 ans, nouveau venu dans l'équipe américaine Cannondale. Skujinš s'est déjà gorgé de cette course champêtre, en 2011, quand il termine deuxième du Tour des Flandres des 19-22 ans. A l'époque, il est présenté comme un «moteur» à explosion, un talent à fracasser n'importe quelle classique. «Un bébé avec une tête d'assassin !» dépeint son soigneur, pour nuancer les yeux bleus candides et les cheveux blonds. «Un très grand potentiel sportif mais aussi un esprit extraordinairement cultivé», relève Lionel Lahoun, son entraîneur du temps où le Letton courait en France, au team La Pomme Marseille.
Bon élève, polyglotte, Toms Skujinš se serait plu dans les statistiques, une discipline «reposante». Boulot de bureau en journée, avant les balades dans ces forêts où il cueillait autrefois myrtilles et champignons. Finalement, il a choisi le sport, avec le même équilibre balte du plein air. Toms Skujiņš se dit «écologiste». «J'essaie d'utiliser uniquement ce dont j'ai besoin», confie-t-il. Mais il l'admet, le cyclisme est discutable : «On fait 25 000 km par an sur le vélo mais on voyage beaucoup en avion. J'espère que ça compense le bilan carbone !» Skujinš, le coureur vert, a offert aux parents de son entraîneur français un cadeau de grande valeur : un jeune cerisier. Au Tour des Flandres, la route longe des arbres fruitiers.