Une bonne minute d'applaudissements debout pour le sélectionneur Didier Deschamps, un garçon «rigoureux, franc et honnête». Samedi, lors de l'assemblée générale de la Fédération française de football (FFF), à Tours, le président de l'institution, Noël Le Graët, n'a pas mégoté son soutien au sélectionneur des Bleus, rudement mis en cause par l'ex-international Eric Cantona qui l'accusait jeudi, à mots (à peine) couverts, de racisme dans les colonnes du Guardian. Le Graët a demandé au foot d'en bas - l'assemblée générale rassemble les élus des Ligues - de serrer les rangs, Deschamps avait d'autres chats à fouetter (il était avec les joueurs à Clairefontaine, où il prépare l'Euro qui débute le 10 juin) et, en l'absence du principal intéressé ou de la plus élémentaire spontanéité, la scène avait un goût prononcé de plébiscite nord-coréen, entre la manipulation et la déréalisation.
L'attaque de Cantona envers Deschamps - que l'ancien joueur de Manchester United méprise de longue date - est bien entendu terrible, à la lisière de la diffamation (sous couvert de «on ne m'empêchera pas de penser», et autres «peut-être, peut-être pas»). Reste la problématique : on confesse s'être fait alpaguer à plusieurs reprises par l'homme de la rue pour dénoncer le prétendu racisme de Deschamps écartant Karim Benzema, le communautarisme étant la note basse qui résonne depuis le début de l'affaire de la sextape impliquant l'attaquant madrilène, son copain d'enfance Karim Zenati et la victime de l'histoire, Mathieu Valbuena. Deschamps n'étant pas du genre à donner des leçons de morale, s'il a écarté Benzema, c'est par pragmatisme. Mais qui peut dire qu'il n'a pas écouté l'opinion publique - entre 73 % et 80 % des Français ne voulaient plus de Benzema chez les Bleus, selon les sondages - et que faut-il penser des tenants et aboutissants de cette opinion publique ?
On peut toujours mettre le couvercle en assemblée générale, ça ne change pas les ingrédients dans la casserole. C’est peu dire qu’ils sont vénéneux.