On s’est dit que les mésaventures de Lassana Diarra sous la liquette bleue appartenaient au passé. En 2010, une maladie sanguine avait réduit à néant ses espoirs de Coupe du monde. En 2013, alors exilé en Russie, il annonçait sa retraite internationale. Peut-être que le milieu défensif a la guigne. Voilà qu’une inflammation au genou gauche, contractée il y a quelques semaines, a eu raison de son optimisme à l’idée d’enjoliver, grâce à un bon Euro 2016, son image très légèrement écornée ces derniers temps.
Atteindre les sommets, pour mieux rechuter. Toujours la même rengaine avec «Lass». Revenu d’entre les morts en début de saison après quinze mois d’inactivité, et adulé d’emblée par les supporteurs de l’olympique de Marseille, le joueur de 31 ans était également devenu indiscutable en équipe de France. Mais son crédit s’est nettement délité auprès d’une partie des fans de l’OM lui reprochant un manque de reconnaissance à l’égard du club qui l’a relancé. L’euphorie, puis la galère, à l’image de sa carrière. «Lass» en cinq dates.
Mai 2010 Le Français sort d'une saison mitigée avec le Real Madrid. Convoqué au rassemblement pré-Coupe du monde de l'équipe de France, le milieu de terrain déclare forfait à cause de la drépanocytose, maladie génétique altérant les globules rouges en altitude. Un premier accroc pour le globe-trotter, déjà passé par cinq clubs (Le Havre, Chelsea, Arsenal, Portsmouth et le Real, donc) à 25 ans. Rappelé en sélection en août de la même année, le jeune homme originaire du 20e arrondissement ne portera plus le maillot français pendant cinq ans. Après avoir refusé une convocation de Laurent Blanc à l'Euro 2012 pour «raisons personnelles», il surprend son monde en annonçant sa retraite internationale en mars 2013, à seulement 28 ans.
Août 2014 La parenthèse russe tourne mal. Recruté par l'Anji Makhatchkala (pour 5 millions d'euros) deux ans plus tôt, Lassana Diarra quitte le club du Daguestan pour le Lokomotiv Moscou en 2013 (pour 12 millions d'euros). Mais les deux parties s'écharpent au bout d'une saison pour une histoire d'argent. «Lass» est invité à baisser son salaire en raison des soucis du Lokomotiv avec le fair-play financier. Il refuse et décide de s'en aller, estimant que son contrat est devenu caduc. Les Russes saisissent la Fifa, laquelle décide de lui infliger une amende de 10 millions d'euros pour rupture abusive de contrat - décision dont il fera appel. Lassana Diarra se retrouve sans club.
Juillet 2015 Son arrivée à Marseille, après quinze mois d'inactivité, apporte son lot d'interrogations, notamment sur sa condition physique. Pendant plus d'un an, Lass s'est entretenu dans son coin avec un préparateur physique. Alors entraîneur de l'équipe olympienne, Marcelo Bielsa n'est pas très chaud. Mais les doutes se dissipent rapidement, au gré de performances homériques avec l'OM. Lors de la première partie de saison, il porte le club - à l'agonie - sur ses épaules.
Octobre 2015. Lassana Diarra retrouve le groupe France, cinq ans après sa dernière sélection. Et surtout, quelques semaines après son retour dans le football. Son profil de joueur qui casse les lignes, rapide, précis et expérimenté est rare. Sa prestation solide face à l'Arménie convainc le sélectionneur Didier Deschamps. A chaque rassemblement, le joueur de 31 ans lui rend cette confiance, et s'impose comme un élément inamovible du onze, à un poste de milieu défensif où personne n'a su se montrer indispensable.
Mai 2016. Lass est plus emprunté. Moins impressionnant dans les duels et précis dans ses transmissions à l'OM, où il est accusé depuis des semaines de se réserver pour l'Euro. Le contraste est criant, mais le problème est peut-être physique. Quinze mois sans jouer, c'est long. Mardi, au lendemain de la victoire française face au Cameroun à Nantes (3-2), le couperet tombe. Son genou endolori met fin à ses espoirs de championnat d'Europe. Un Euro en France qui lui aurait offert une visibilité certaine auprès des clubs intéressés par son profil.
Nouveau souci de contrat. Engagé quatre ans avec le club phocéen, Lass invoque un document sous seing privé - sans valeur juridique - qui stipule un accord entre les deux parties pour que l'international français puisse quitter Marseille gratuitement. Or, l'OM, en difficulté financière, estime pouvoir récupérer une indemnité de transfert. Dans une entrevue donnée à l'Equipe le 24 mai, l'ex-joueur de Chelsea a tenu à clarifier la situation : «J'avais un accord avec le président. C'était du donnant-donnant. Il m'a mis une clause dans mon contrat qui me permettait de quitter le club […]. Sans ce deal, je ne serais jamais venu. Aujourd'hui, sans vouloir manquer de respect, je n'ai pas besoin de l'autorisation de l'OM pour quitter Marseille.» Mais la donne a changé avec cette blessure et la décision de la Fifa de confirmer, il y a quelques jours, la sanction financière de 10 millions d'euros. Lass a encore des problèmes. A 31 ans.