Revue des forces et faiblesses de l'équipe de France qui entame son Euro à domicile vendredi soir face à la Roumanie.
Pourquoi les Bleus vont briller
Mardi, à trois jours de l’entrée des Bleus dans la compétition, c’est le gardien remplaçant Steve Mandanda qui a été envoyé devant les micros par le sélectionneur, Didier Deschamps - c’est lui et personne d’autre qui décide qui parle pendant la compétition, et quand.
Le portier marseillais n'ayant aucune chance de jouer d'ici un mois sauf blessure ou suspension du titulaire, Hugo Lloris, on a râlé. Puis on a compris : «Ma façon de voir mon rôle de remplaçant a évolué au fil du temps. Je me prends moins la tête, j'ai accepté ma condition. Je privilégie le collectif plutôt que ma personne. Je pense être écouté dans le vestiaire, peut-être pas comme un titulaire ou un capitaine [c'est Lloris qui a le brassard, ndlr], je reste à ma place, mais quand même, je peux gueuler, modérer, conseiller… Quant à ma relation avec Lloris, il existe un respect mutuel.» Mandanda pousse le bouchon : les deux hommes cohabitent mais ne s'aiment pas.
Mais il ne s'est pas non plus présenté devant la presse pour mentir frontalement : le natif de Kinshasa était là pour faire passer le message que la cosmologie tricolore est en ordre. Les remplaçants ont accepté leur condition de remplaçant, ceux qui pourraient prétendre à une place de titulaire n'en restent pas moins sous pression (des fois que les circonstances les sortiraient du banc) et Deschamps tient ses braves - «il sait absolument tout ce qui se passe, et même l'état d'humeur de chacun», Mandanda toujours. A ce stade, l'équipe de France est tenue, disciplinée.
Quant aux joueurs, l'Observatoire du football, un groupe de recherche appartenant au Centre international d'étude du sport basé à Neuchâtel (Suisse) et intégrant une multitude de paramètres (rendement, âge, potentiel…), classe trois Français parmi les douze joueurs les plus bankables de la planète : Antoine Griezmann (7e), Anthony Martial (11e) et Paul Pogba (12e). Dit autrement : Deschamps a sous la main de quoi faire.
Pourquoi les Bleus vont chuter
«Imaginer tout ce qui nous est arrivé depuis l'annonce de la liste des 23 partants pour l'Euro le 12 mai, franchement, même dans les pires cauchemars, je ne pense pas que j'aurais pu y parvenir.» Etrange interview donnée, mardi, dans l'Equipe par Didier Deschamps : alors qu'il avait passé un deal avec le quotidien sportif pour ne pas aborder les «polémiques» (en réalité l'accusation de Karim Benzema, qui lui reproche d'avoir donné prise à une partie raciste de l'opinion avant de l'écarter), le sélectionneur des Bleus en dit un peu quand même, laissant transparaître une forme de lassitude - voire de dégoût - concernant les attaques dont il a fait l'objet.
Sous contrat jusqu'au Mondial russe de 2018, il raccourcit quelque peu cette perspective : «On va bien voir ce qui se passe à l'Euro. Ensuite, il y aura une analyse.» Manière de laisser entendre qu'il est libre de prendre ses cliques et ses claques et que, d'ailleurs, ça lui ferait des vacances. Avant la liste, il avait déjà eu la (mauvaise) surprise de voir publiées des écoutes remontant à la période où il entraînait l'Olympique de Marseille : rien de grave à ce stade, mais si on ajoute la cascade de blessés aux mêmes postes (quatre défenseurs ont déclaré forfait pour cause de blessure, un autre a été suspendu temporairement pour soupçon de dopage) et la perte de son meilleur joueur (Lassana Diarra) lors du stage en Autriche, l'entraîneur tricolore, aussi costaud qu'il soit, peut finir par être fragilisé.
D’autant que l’assemblage repose sur lui : si les Bleus ont toujours brillé en phase finale dans le sillage d’un joueur offensif ultra-dominant (Raymond Kopa, Michel Platini, Zinédine Zidane), on peine à trouver un tel spécimen dans les rangs tricolores aujourd’hui. Bien sûr, Antoine Griezmann est sans doute un grand joueur. De là à lui faire porter les responsabilités collectives et penser qu’il fera tourner les matchs mal embarqués, il y a une marge considérable. Et un doute.