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Foot : face au Portugal, les quatre piliers polonais

Alors que la Pologne rencontre la sélection de Cristiano Ronaldo ce jeudi à 21 heures en quarts de finale de l'Euro, retour sur quatre joueurs emblématiques de cette cuvée polonaise 2016.
La Pologne à l'entraînement à Marseille le 29 juin. (Photo Anne-Christine Poujoulat. AFP)
publié le 30 juin 2016 à 14h43

Lukasz Fabianski, la revanche d’un portier

«Les arrêts, on s'entraîne pour ça. Je suis surtout heureux d'avoir pu aider l'équipe. On veut juste rendre les Polonais fiers de nous.» Au sortir de sa prestation homérique face à la Suisse samedi – deux arrêts monumentaux face à Rodriguez et Derdiyok –, Lukasz Fabianski a fait preuve d'une humilité déconcertante. Mais finalement, assez compréhensible, vu les épreuves qu'il a traversées. A Arsenal, les supporteurs le surnommaient «Flappyhandski» – contraction de ses «mains qui s'affolent» et de son nom de famille. Jamais facile à encaisser, quoi qu'on en dise. La coach d'Arsenal, Arsène Wenger, ne lui a jamais vraiment accordé sa confiance, lui préférant son compatriote – et concurrent en sélection – Wojciech Szczesny, dès la saison 2010-2011. Condamné à disputer seulement 32 rencontres de Premier League avec les Gunners en sept ans (la faute aux blessures, aux méformes et à la concurrence), le portier polonais s'est refait une santé à Swansea, où il évolue depuis 2014. Retrouver du temps de jeu avec l'équipe galloise lui a permis d'engranger de la confiance. Après la rencontre face aux Suisses, il a implicitement revendiqué la place de titulaire en sélection, dont il a hérité après la blessure à la cuisse de Szczesny face à l'Irlande du Nord : «Cette situation en équipe nationale n'est pas décevante, seulement un peu frustrante. C'est au sélectionneur de décider. De mon côté, j'ai dû travailler plus dur pour être prêt à affronter n'importe quelle situation.» L'ex-pensionnaire du Legia Varsovie (à l'instar de Szczesny) peut remercier l'illustre Frans Hoek, entraîneur de gardiens à Manchester United (ex-Barca, Ajax). Le Néerlandais, qu'il a connu en équipe nationale de Pologne de 2006 à 2009, aurait, de son propre aveu, exercé «une grande influence» sur sa personnalité.

Michal Pazdan, ressorti de nulle part

N’ayons pas peur de le dire : Michal Pazdan est l’une des belles surprises de l’Euro. Solide dans ses interventions défensives, pas embêté avec le ballon, le défenseur du Legia Varsovie réalise un tournoi plus que correct avec la Pologne. Il forme la paire de centraux avec l’excellent Kamil Glik du Torino. Sa corpulence (1,80 m, 78 kg) et son crâne rasé renforcent l’aspect autoritaire de son jeu. Dans les «un contre un», le natif de Cracovie se montre impitoyable. Mais la puissance physique n’est pas sa seule caractéristique : il est aussi bon dans la lecture des trajectoires. Samedi, après le huitième de finale remporté par la Pologne, Pazdan était le joueur ayant effectué le plus d’interceptions (13) depuis le début de la compétition. Sa solidité défensive plairait au Borussia Dortmund, qui songerait à formuler une offre pour le récent champion de Pologne, privé de demi-finale en cas de carton jaune face au Portugal. Mais cette épée de Damoclès ne l’empêchera pas d’aller au charbon face à Cristiano Ronaldo ce jeudi soir.

Kamil Grosicki, l’addict au jeu et aux jeux

Kamil Grosicki dynamite le couloir gauche de la sélection, dont il est la caution «folie». Le super-sub («super-remplaçant») rennais (7 buts en sortie de banc cette saison en Ligue 1) se montre particulièrement remuant depuis l'entame de l'Euro. Son jeu basé sur la percussion et les changements de rythme impulse les attaques polonaises et met au supplice ses vis-à-vis. Pourtant, l'ailier supersonique aurait pu ne jamais connaître cette relative consécration sur la scène internationale. En 2007, le feu follet, alors âgé de dix-neuf ans, rejoint le Legia Varsovie, grâce à des performances remarquées avec le Pogoń Szczecin, le club de sa ville natale. Très vite, «Turbo Grosik» (son surnom) sombre. Addiction aux jeux, penchant pour l'alcool, il tombe dans de nombreux vices. A l'époque, le joueur confie son mal-être au site Legia.net : «Le jeu m'a dévoré. Le casino est un lieu comme les autres, à condition d'y aller de temps en temps et pour le plaisir. Tout le monde aime les moments de risque, de tension, mais j'ai perdu le contrôle. J'ai perdu tout l'argent que j'avais, jusqu'au dernier sou, maintenant je n'ai plus rien. Je ne veux même plus marcher dans les rues où il y a des casinos.» Après un mois de cure dans un centre spécialisé dans la lutte contre les addictions, Grosicki est prêté au FC Sion. Mais il n'a aucune prise de conscience : il renonce aux cours de français payés par le club, multiplie les retards à l'entraînement et est impliqué dans deux accidents de la route. Proche d'arrêter le foot après une expérience suisse calamiteuse, il renaît au Jagiellonia Bialystok (D1 polonaise), avec qui il remporte la Coupe et la Supercoupe de Pologne en 2010. Après une parenthèse turque à Sivasspor, le «wesolek» – le «farceur» – débarque à Rennes en janvier 2014. Il n'est pas un indiscutable de la formation bretonne mais son état d'esprit est irréprochable. Son coach mental engagé il y a deux ans y est sûrement pour quelque chose.

Arkadiusz Milik, le joyau

L’esthète de la sélection. Le joueur frisson. A 22 ans, Arkadiusz Milik s’est déjà imposé comme un élément incontournable de la Pologne. Meilleur passeur des éliminatoires de l’Euro (six caviars), le joueur de l’Ajax Amsterdam troque souvent son costume de distributeur pour celui de buteur. En 2014-2015, pour son premier exercice avec le club néerlandais, il inscrit 23 buts en 34 matchs. Cette saison, le joueur longiligne (1,89 m, 78 kg) facture 21 réalisations et 8 passes décisives en 31 rencontres d’Eredivisie. Des statistiques impressionnantes qui ne suffisent pas à mesurer l’impact de ce manieur de ballon. Sur le terrain, Arkadiusz Milik brille par son élégance balle au pied, l’efficacité de son jeu de tête et l’intelligence de ses déplacements. Depuis le début de l’Euro, il a volé la vedette à Robert Lewandowski, plus emprunté et moins inspiré dans le jeu. L’époque de ses déboires allemands est révolue. Acheté 3 millions d’euros par le Bayer Leverkusen en décembre 2012 – qui, à l’époque, se targue d’avoir braqué «le plus grand talent de Pologne», au Gornik Zabrze, club local –, Milik est prêté à Augsburg la saison suivante. Mais un temps de jeu insuffisant (il dispute une vingtaine de matches) poussera le Bayer à le céder de nouveau en prêt, cette fois-ci à l’Ajax. Où il signe définitivement à l’été 2015, avec les résultats que l’on connaît.