Menu
Libération
à plat

«Finir la course chaque jour, c’est une victoire»

Tour de France 2016dossier
Le Danois Michael Morkov, de l'équipe Katusha, victime d'une chute lors de la première étape, peine chaque jour pour rejoindre l'arrivée. Il raconte ses efforts et stratégies pour tenir le coup.
Michael Morkov (à droite) après sa chute le 2 juillet, entre le Mont-Saint-Michel et Sainte-Marie-du-Mont. (Photo Kenzo Tribouillard. AFP)
publié le 6 juillet 2016 à 11h49

Il a fini dernier de l’étape, à 14’39 du vainqueur à Limoges, Marcel Kittel. Le Danois Michael Morkov (Katusha) traîne sa peine sur la route du Tour de France depuis maintenant quatre jours et la première étape entre le Mont-Saint-Michel et Utah Beach. Victime d’une chute spectaculaire dans l’emballage final, le coureur de 31 ans, blessé à la jambe droite, tente désormais de récupérer avant l’arrivée du peloton dans les Pyrénées. On l’a retrouvé mardi soir au massage dans une chambre d’hôtel de Limoges. Il raconte ses efforts pour continuer son Tour, malgré la douleur.

Décrivez-nous ce que vous demandez au soigneur chaque soir…

Le staff médical travaille très dur pour moi. Après une chute comme celle que j’ai vécue, tu as vraiment besoin de beaucoup de soins, pas seulement un massage. Mathi, le masseur, fait très attention aux zones où il appuie, et là où il ne doit pas y aller trop fort. Ce soir, je lui ai demandé de travailler sur ma jambe gauche, parce que je compense sur celle-ci et elle fatigue. Il faut essayer de la garder fraîche, et, en même temps, tenter de récupérer la droite.

Comment votre blessure évolue-t-elle ?

Ça va mieux chaque jour, c'est un gros soulagement. Mardi matin, pour la première fois, j'ai pu tenir debout sur ma seule jambe gauche et j'ai senti que je pouvais réutiliser les muscles. Mais j'ai besoin d'une amélioration plus substantielle pour survivre au week-end qui s'annonce [de vendredi à dimanche, les coureurs passeront trois jours dans le massif pyrénéen, ndlr]. Finir la course chaque jour, c'est une victoire. Mardi, c'était l'étape la plus longue du Tour (237,5 kilomètres), et le défi sera encore plus grand mercredi avec l'arrivée en altitude au Lioran. L'objectif, c'est de tenir jusqu'à la journée de repos lundi.

A quoi faites-vous attention sur le vélo ?

J’essaie de me concentrer sur la façon dont j’utilise mes muscles, notamment ceux de la cuisse. Je m’efforce aussi d’être le plus stable possible sur le vélo pour ne pas risquer une nouvelle blessure. J’ai déjà couru cinq grands tours avant celui-ci, et je n’avais jamais connu de situation pareille. Si ce n’était pas le Tour de France, je serais probablement rentré à la maison pour récupérer, mais comme c’est la plus grande course de l’année, tu veux vraiment continuer à te battre.

Et la douleur ?

J’essaye de travailler avec. Aujourd’hui, j’ai commencé à avoir mal au genou. Je me suis efforcé de me concentrer sur les muscles de ma jambe qui fonctionne bien. Dans le vélo, il y a des fois où on a mal, mais on sait que c’est la douleur qui va apporter des victoires. Là, c’est une douleur que je ne connais pas, et ça devient plus sérieux.

Michael Morkov sur le 
Paris-Nice, le 6 mars 2016. (Photo Kenzo Tribouillard. AFP)
Comment se sont passés les derniers jours ?

L’étape de dimanche était très dure, j’ai dû être quasiment à mon maximum toute la journée, juste pour finir la course. Je sens que j’ai payé ça aujourd’hui. Les autres sont plus frais que moi. Lundi, l’étape n’est pas allée vite, j’ai été chanceux et j’ai même pu lâcher un peu à la fin et arriver dans les délais. Aujourd’hui (mardi), j’ai essayé de calculer les délais avant l’étape. Je me suis dit qu’ils seraient situés entre 15 et 18 minutes et que si je pouvais rester avec le peloton jusqu’à 25 kilomètres de l’arrivée, ça devrait le faire. C’était mon objectif. J’ai été lâché un peu avant, mais je me sentais bien et j’ai pu finir assez tranquillement. Dans une des dernières montées, j’ai entendu plein de Français m’encourager. Je les remercie, ils ne sont pas obligés d’aider un coureur étranger. Le Tour, ce n’est pas seulement les gens qui gagnent, mais aussi des histoires, des gens qui perdent, qui se battent pour rester dans la course.

En même temps, en tant que coureur professionnel et compétiteur, ça doit être frustrant de ne pas tenir de rôle actif…

C’est très décevant, parce que je devais faire partie du train d’Alexander Kristoff, notre sprinteur. C’est ce que j’adore faire et ce pour quoi je m’entraîne toute l’année. Le matin, lors de la réunion d’équipe, je ne suis pas content. Mais je dois accepter la situation. L’accident m’a mis loin derrière. C’est la même chose dans la vie, il y a des choses que tu ne peux pas contrôler et dont tu dois tirer le meilleur. Pour l’instant, je dois récupérer, et si je peux être utile à l’équipe, même le dernier jour à Paris, ça sera bien.