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Libération
Débrief

Si vous n'avez pas vu la finale France-Portugal

Les Bleus se sont inclinés 1-0 en finale de l'Euro face à des Portugais plus réalistes qui décrochent leur premier titre international.
Arrêt de Rui Patricio sur un tir de Giroud, lors de la finale France-Portugal. (AFP)
publié le 10 juillet 2016 à 23h54

L’équipe de France s’est inclinée en finale de l’Euro face au Portugal à l’issue de la prolongation (1-0), grâce à un but d’Eder à la 109e minute. Il n’y aura donc pas de sacre à domicile, malgré un match globalement maîtrisé et dominé. Le Portugal, excellent en prolongation, s’est tenu à son plan : ramener la coupe, peu importe la manière.

Le match. Les finales sont rarement débridées, mais ce France-Portugal a longtemps eu des allures de purge. Disons que les Bleus, moins à l'aise quand on leur demande de faire le jeu, ont fait ce qu'ils ont pu face à un adversaire à la stratégie ultra-pragmatique : fermer tous les espaces, endormir le match, contrer. L'équipe de France a longtemps acculé le Portugal (très brouillon et certainement émoussé par deux prolongations) dans son camp et dans sa surface, se procurant les meilleures situations et les occasions les plus franches (Griezmann, Sissoko, Giroud).

Il y avait soit une jambe pour contrer, soit les mains de Rui Patricio - auteur d'un excellent match - ou soit le poteau (après une action de Gignac, entré en jeu à la place de Giroud, qui avait humilié Pepe dans la surface). Le chiffre : il a fallu attendre la 79e minute pour voir la première frappe cadrée des hommes de Fernando Santos, qui a prévenu dès son intronisation 2014 que la manière en football était un détail quand on ne peut plus se permettre d'échouer (le Portugal était catalogué loser magnifique). Et ils ont gagné.

L'homme. Ça fait longtemps que le Portugal n'a plus eu de grand avant-centre - son talon d'achille. Alors, il se pointe en compétition internationale avec des golgoths plutôt techniques et intelligents, mais trop lents et prévisibles. Eder est l'un d'entre eux, mais sur ce coup, il s'est sublimé. Entré à la 79e minute, le Lillois a été excellent, notamment dans la conservation du ballon. A la 109e, il a joué au messie en dégainant une énorme frappe croisée aux 25 mètres.

Le Bleu. Moussa Sissoko réalisait un bon Euro jusque-là, très juste tactiquement et très précieux physiquement, avec cette capacité à jouer partout. Didier Deschamps adore ces profils de soldats polyvalents et le milieu de Newcastle, en difficulté en club cette saison, lui a rendu sa confiance. Replis défensifs, rushes dans l'axe ou côté droit, frappes de numéro 9 (2 tirs cadrés) : il faudra du temps avant que quelqu'un ose le re-traiter de simple bourrin. Son club, relégué en deuxième division, doit se frotter les mains. Parole, sa cote a au moins doublé.

Le tournant. A la 74e minute, Kingsley Coman adresse un excellent centre côté gauche. Seul au point de penalty, Antoine Griezmann reprend de la tête, mais le ballon passe juste au-dessus.

Le moment. Cristiano Ronaldo, la superstar du Portugal, auteur d'un but de Xmen en demi-finale (une tête en apesanteur), n'a pas résisté à un contact dès la 8e minute avec Dimitri Payet, auteur d'une faute involontaire. Il a fait la moue et boité, puis il est sorti en pleurant (avec un papillon sur le coin du visage), avant d'essayer de revenir en vain.

Le cerveau. Fernando Santos, l'entraîneur portugais, est un saboteur, qui a décidé de faire jouer son équipe avec ses méninges, plus qu'avec ses pieds. On connaissait le Portugal adepte du jeu léché, toujours en recherche de la plus belle action, on a fait connaissance avec une machine capable d'étouffer n'importe quel adversaire et surtout, de résister. L'ancien sélectionneur de la Grèce, 61 ans, a un côté moine, fervent catholique et sacré saboteur. Il fait entrer sa sélection dans l'histoire, dont le palmarès était vierge jusque-là (il n'y avait que quelques matches références).

Esotérisme. L'Italie a battu l'Espagne (sa bête noire depuis 2008), l'Allemagne a éliminé l'Italie (elle ne l'avait jamais fait en compétition internationale), la France a sorti l'Allemagne (58 ans après) et le Portugal n'avait pas battu la France depuis 1975. C'est donc l'Euro où les séries s'arrêtent.