Retour sur les petits et grands moments de la soirée d’athlétisme de samedi au stade olympique de Rio.
Un solo pour commencer
1’30'' : c’est le temps (chronométrage à la louche) qu’a mis un parfait anonyme (journaliste? technicien? cuistot sur un stand de hamburger du stade?) à boucler environ 300m (une distance pas du tout olympique) sur la piste du stade Olympique de Rio, en fin d’après-midi. Profitant de la longue pause entre les sessions du matin et du soir, d’un stade vide et d’un service d’ordre probablement en sieste, il s’est élancé seul sur l’oval bleu du stade, sous les applaudissements et les rires du très maigre public.
Fraser rate son pari…
Shelly-Ann Fraser, comme Usain Bolt, rêvait d’un triplé inédit sur 100m. La Jamaïcaine, qui l’avait emporté à Pékin et Londres, serait devenue la première athlète à accomplir une telle performance. Elle a échoué, battue par sa compatriote Elaine Thompson (auteure d’un 10’’71 canon) et l’américaine Tori Bowie (10’’83). Elle sauve le bronze en devançant au millième l’Ivoirienne Marie-Josée Talou (10’’86 toutes les deux).
… Farah réussi la première moitié du sien
Mo Farah vise, lui, à Rio, un deuxième doublé consécutif après celui réalisé à Londres sur 5000 et 10000 mètres. Le Britannique a fait la moitié du job en l’emportant sur 10000 au terme d’une course menée grand train par les Kenyans et les Ethiopiens. Mais comme à chaque fois depuis 2011 (il est invaincu depuis quatre ans en grand championnat sur 5000 et 10000), c’est le Britannique qui a eu le dernier mot. Le Kényan Paul Tanui a eu beau lancer un sprint de fou furieux à 300m de la ligne, Farah l’a suivi puis déposé dans la dernière ligne droite. L’Ethiopien Tamirat Tola complète le podium.
Pas de bis pour le «super saturday»
A Londres, en 2012, trois athlètes britanniques, Mo Farah (10 000m), Jessica Ennis-Hill (heptathlon) et Greg Rutherford (longueur), avaient embrasé le pays en obtenant, lors du désormais fameux «super saturday», trois médailles d’or en 45 minutes. Cette ruée vers l’or a été élue, lors d’un sondage, meilleur souvenir des Britanniques de toute l’histoire des JO. Les trois mêmes étaient à Rio, quatre ans plus tard, et visaient un remake, ce samedi. Raté, de peu. Mo Farah a donc fait sa part en l’emportant sur 10000. Mais Rutherford a dû se contenter d’arracher le bronze sur son dernier essai, devancé par l’Américain Jeff Henderson et le Sud-Africain Luvo Manyonga. Et à l’issue d’un final à couper le souffle, Jessica Ennis-Hill a dû laisser l’or sur l’heptathlon à l’étourdissante belge Nafissatou Thiam, 21 ans. Pas de super saturday, mais quand même trois médailles.
Pris la main dans le sable
L'Américain Jarrion Lawson, après un dernier essai énorme dans le concours de la longueur, était persuadé de monter sur le podium. Et à le voir sautiller en attente de sa marque, on jurerait qu'il était persuadé de décrocher la timbale dorée. Le public y croyait aussi. Jusqu'à ce que l'affichage officiel indique un vilain 7,78m, très loin de la marque du leader (8,38m). Abasourdi, Lawson est retourné vers le sautoir, puis vers les officiels, comme un tennisman qui irait chercher la marque de sa balle donnée faute par l'arbitre. Mais les râteaux étaient passés pour aplanir le sable derrière lui. «Eh gars, c'est là que je suis retombé!», semblait-il dire. Le ralenti sur l'écran géant a donné l'explication : une main gauche qui traîne et effleure le sable. Il termine quatrième et a immédiatement tweeté sa déception : «C'était une grande compétition. Honnêtement, je ne pense pas avoir perdu. Evidemment, je ne pense pas que ma main a touché le sable. mais le meilleur est à venir!»
Usain Bolt rend les journalistes dingues
Dans la zone mixte, où les athlètes rencontrent brièvement les médias après les épreuves, Usain Bolt affole les journalistes. Il faut que le Jamaïcain hausse la voix et fasse la police pour mettre un peu d'ordre dans la jungle de perches et caméras qui s'agglomèrent autour de lui. Effrayant amas de visages congestionnés, où tout est permis, de la clé de bras aux coups de micro, pour avoir un mot de la star. Pendant ce temps, il faut aussi deux volontaires pour faire la police pour empêcher les journalistes de se transformer en groupies et de prendre des photos, ce qui est rigoureusement interdit dans cet espace. «No pictures, no pictures!», grondent deux jeunes femmes en chasuble jaune. Parfaitement en vain. Une bonne dizaine de smartphones sont brandis à bout de bras pour se faire des souvenirs. En revanche, tendre un dictaphone pour recueillir les impressions de Bolt est autorisé (c'est même à ça que sert la zone mixte, donc) mais, à moins d'être champion de MMA, c'est donc impossible sans risquer sa vie. On n'a pas essayé. Mais on avoue qu'on a pris une petite photo.
Trois avions sur le 400m
La finale du 400m hommes, programmée dimanche, juste avant celle du 100m, promet d’être magnifique. Parmi les huit athlètes qui s’élanceront figurent trois des dix meilleurs performers de l’histoire. Le Sud-Africain Waye Van Niekerk (record à 43’’48), l’Américain Lashawn Merritt (43’’65) et le champion olympique en titre, Kirani James de la Grenade (43’’74). Les trois ont fait une énorme impression lors des demi-finales, et promettent une baston de feu. Et pourquoi pas s’approcher du vieux record du monde de Michael Johnson (43’’18)?
Et les Français(es) ?
Kafétien Gomis, avec un bond à 8,05m, a terminé 8e de la finale de la longueur. Antoinette Nana Djimou termine à une décevante 11e place du concours de l'heptathlon. «J'ai jamais été aussi nulle en compétition », a-t-elle sobrement résumé. Pierre-Ambroise Bosse disputera la finale du 800m, lundi soir. Le Français a remporté avec autorité sa demi-finale en 1'43''85. Bosse -parce qu'il a parfois du mal à gérer le trafic dans les fins de courses tactiques?- a décidé de faire au plus simple : il a bombardé tout du long, ou presque. Deuxième après le premier tour, il a pris la tête puis remis un gros coup de turbo à 250m. A la perche, Renaud Lavillenie a assuré. En réussissant 5,70m à sa deuxième tentative, il s'est qualifié pour la finale de la perche. Les deux autres français Stanley Joseph et Kévin Menaldo, sont restés bloqués à 5,45m. Trop juste pour la qualification.