Si Mercedes a encore écrasé la concurrence cette saison, permettant à Nico Rosberg d'enfin devenir champion du monde à Abou Dhabi dimanche lors de la dernière épreuve, remportée par son équipier Lewis Hamilton, il ne s'en est pas moins passé pas mal de choses cette saison, sur et en dehors de la piste.
Massa et Button, militants de la retraite avant 40 ans
Des quatorze saisons en F1 de Felipe Massa (arrivé en 2002 chez Sauber), qui stoppe sa carrière à 35 ans chez Williams, on retient quatre choses. Tout d’abord, il a fait quasi jeu égal avec Michael Schumacher pour sa première année chez Ferrari en 2006. Ensuite, il a passé, sur sa Ferrari, le drapeau à damier en étant champion du monde lors du pluvieux dernier Grand Prix 2008, chez lui au Brésil… avant de perdre le titre quelques dizaines de secondes plus tard, quand l’Allemand Timo Glock a commis une erreur dans le dernier tour et s’est fait passer par Lewis Hamilton, permettant in extremis à ce dernier de grappiller le point qui lui manquait pour remporter sa première couronne.
Neuf mois plus tard, tournant dramatique dans la carrière du Brésilien : il se prend en plein casque, au cours des essais du Grand Prix de Hongrie, une pièce perdue par la monoplace de son compatriote Barrichello. Même s’il en sort finalement sans séquelles après deux jours de coma, il n’a jamais retrouvé son niveau d’avant.
Enfin, sa dernière course à domicile, le 13 novembre sur sa Williams, restera dans les esprits : après son abandon sur sortie de piste, il s'est offert un émouvant retour vers les stands sous l'ondée, un drapeau brésilien sur les épaules et les yeux humides, acclamé par les spectateurs puis par les mécanos. Et même si «tous ces moments se perdront dans le temps comme les larmes dans la pluie», comme dit l'androïde Roy Batty (Rutger Hauer) à la fin de Blade Runner, on est finalement content que Massa se soit planté pour voir ça.
Williams, Benetton qui deviendra Renault, BAR qui deviendra Honda puis Brawn, en enfin McLaren à partir de 2010. Jenson Button qui, lui aussi, met pied à terre à 36 ans, après 17 saisons et un titre mondial (2009), aura connu quatre structures sous sept noms différents. Arrivé à 20 ans dans le circus avec le statut de jeune prodige, la carrière de l’Anglais à l’allure de gentleman va être longue à se décanter. Il remporte sa première course après 113 épreuves, avec Honda, en 2006 en Hongrie.
Les saisons 2007 et 2008 sont laborieuses pour l’équipe japonaise, mais un étonnant alignement des planètes va profiter à Button en 2009. Honda jette l’éponge fin 2008 au prétexte de la crise financière, non sans avoir effectué un énorme travail de développement sur la voiture de 2009, sous la houlette du directeur technique Ross Brawn, ancien complice de Schumacher chez Ferrari. Ce dernier, conscient d’avoir mis au monde une bombe, rachète l’écurie pour rien et la rebaptise de son nom. S’ensuit une étrange saison, où la Brawn GP écrase tout le monde avant de se faire rattraper par la concurrence. Mais Button a pris tellement d’avance qu’il devient champion du monde, non sans un certain scepticisme chez ses confrères et chez les amateurs.
Transféré chez McLaren la saison suivante, il fera taire ses détracteurs en faisant jeu égal avec son équipier, le champion du monde 2008, Lewis Hamilton. On retient cette phrase, à l'issue de sa deuxième course et sa première victoire avec sa nouvelle équipe, en mars 2010, obtenue à la roulette à Melbourne sous la pluie : «Gagner avec une Mclaren. Ça a l'air bien, n'est-ce pas ?»
Roulez jeunesse
Max Verstappen bien sûr, Esteban Ocon, Pascal Wehrlein, Carlos Sainz Jr… La jeune génération (les moins de 23 ans) a fait son trou en 2016. De manière définitive pour le Néerlandais, intronisé chez Red Bull après un an et demi de F1, et qui, malgré quelques bourdes, a donné du fil à retordre à son brillant équipier, l'Australien Daniel Ricciardo. Chaude ambiance à l'horizon entre les deux.
Le Français Ocon (à partir de Spa-Francorchamps) et l’Allemand Wehrlein, tous deux protégés de Mercedes, se sont tiré la bourre au sein de la petite écurie Manor. Finalement, c’est le Français qui décroche le pompon en étant promu chez Force India (qui termine le championnat à une belle quatrième place) pour 2017. Wehrlein l’a mauvaise mais rien n’est perdu pour lui.
Quant à l’Espagnol, fils de, il s‘est montré à l’aise pour sa deuxième saison chez Toro Rosso et s’est retrouvé dans les petits papiers de Renault pour 2017, mais le management Red Bull a préféré le conserver dans son giron.
A suivre également l'an prochain, le Belge Stoffel Vandoorne, qui remplace Button chez McLaren, et un Canadien de 18 ans, Lance Stroll, qui remplace Massa chez Williams, avec du talent et surtout beaucoup de pépettes (père milliardaire). On retient la sublime course (qu'il termine troisième après une folle remontée depuis la seizième place, en treize tours) d'acrobate sous la pluie de Verstappen à Interlagos le 13 novembre. La marque des plus grands, avec notamment ce travers maîtrisé à 240 km/h devant Rosberg.
Ron Dennis, le crépuscule
Du raffut chez McLaren en coulisses, à défaut d’étincelles en piste. Son directeur et actionnaire à 25%, Ron Dennis, qui avait pris la tête de McLaren en 1981, s’est fait destituer de son poste par les autres actionnaires coalisés – le groupe TAG du milliardaire saoudien Mansour Ojjeh, dont il était pourtant le vieux partenaire chez McLaren depuis des décennies et qui détient également 25% des parts, et le fonds bahreïni Mumtalakat, qui possède les 50% restant. Une situation qui fait suite à l’échec d’une tentative de Dennis de prendre le contrôle du groupe avec des investisseurs chinois… Quant à la rumeur de rachat par Apple, elle a fait pschiiit.
Haas, c’est presque l’Amérique
La nouvelle équipe américaine, motorisée par Ferrari, qui faisait rouler Romain Grosjean et le Mexicain Esteban Gutiérrez, a effectué des débuts honorables, avec 29 points inscrits par le Français, essentiellement en début de saison. La monoplace s’est montrée très irrégulière et difficile à régler tout au long de l’année, mais elle laisse finalement derrière elle Renault, Sauber et Manor. Pas si mal pour une première.
La F1 change de mains
Après des années de rumeurs de rachat, le Formula One Group, l'organisme qui gère le circus, est finalement en train de changer de mains, passant de CVC – qui l'avait acquise en 2006 – au groupe américain Liberty Media. Le business model F1 (circuits et télés payent pour en être, une partie de cette manne étant redistribuées aux équipes) demeure rentable pour ses propriétaires, même si les audiences baissent. Et qu'on se rassure, Bernie Ecclestone (85 ans) continuera de gérer les droits commerciaux…