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F1 : nouvelles règles, nouvelles courses

Ce dimanche à Melbourne s'ouvre la nouvelle saison de Formule 1. Les changement de règlement pourraient modifier la donne mais peut-être pas au point de menacer la suprématie de Mercedes.
Après la retraite, de Nico Rosberg, son coéquipier la saison dernière chez Mercedes, le Britannique Lewis Hamilton sera l'immense favori de la saison qui démarre dimanche à Melbourne. (Photo Saeed Khan. AFP)
publié le 25 mars 2017 à 11h16

[Actualisation, dimanche 26 mars, 9 h 30: L'Allemand Sebastian Vettel (Ferrari) a remporté dimanche le Grand Prix d'Australie, sur le circuit de l'Albert Park à Melbourne, devant le favori britannique Lewis Hamilton (Mercedes), parti en pole position. Le quadruple champion du monde n'avait plus gagné depuis le Grand Prix de Singapour en 2015, la plus longue disette de sa carrière depuis sa première victoire en 2008.]

Qui dit Formule 1, dit Mercedes ! C'est en tout cas vrai depuis trois ans. L'écurie allemande domine sans partage la discipline s'adjugeant chaque année les titres pilotes et constructeurs. Une hégémonie qui rend «les courses ennuyeuses» selon l'ancien patron de la F1, Bernie Ecclestone qui déclarait au quotidien allemand Welt am Sonntag en 2015: «La domination de Mercedes est si forte que bon nombre de gens regardent le départ d'un Grand Prix puis éteignent la télévision […] Les spectateurs ne doivent pas savoir avant le départ d'un GP qui va l'emporter…» La nouvelle saison, qui débute ce dimanche à Melbourne par le GP d'Australie, ne devrait pas déroger aux habitudes. Quoique.

Un nouveau cadre réglementaire

Malgré la retraite de son champion du monde en titre, l’Allemand Nico Rosberg, Mercedes apparaît avec le Britannique Lewis Hamilton, dauphin l’an passé, comme le grandissime favori cette saison encore. Toutefois, Ferrari et Red Bull tenteront de contester l’hégémonie des Flèches d’Argent en profitant de l'un des plus grands changements techniques de l’histoire de la F1. Désormais le développement du moteur en cours de saison est plus libre, ce qui devrait avantager les motoristes dans leur recherche constante de vitesse. Les pneus ont été élargis; ils devraient moins se dégrader, un souci enlevé au pilote. Le poids minimum de certaines pièces comme les systèmes de récupération d’énergie a été bloqué pour limiter cette fois-ci leur développement et une «course à l’armement» qui profite aux constructeurs les plus puissants (Mercedes par exemple). Si une redistribution totale des cartes n’est pas à l’ordre du jour – il y a quand même peu de chances de voir Mercedes régresser – on peut escompter voir Ferrari et Red bull s’en rapprocher ou même l’égaler.

L’autre effet attendu de ce nouveau cadre réglementaire? Spectacle et performance. Plus basses, plus larges, avec des éléments aérodynamiques plus imposants, les F1 du cru 2017 devraient satisfaire les passionnés critiques sur l’aspect esthétique des monoplaces ces dernières années. De plus, les voitures seront cinq secondes plus rapides au tour. De quoi ravir les aficionados. Mais pas que.

(Enfin) des kilos en trop !

Le poids des monoplaces est passé à 728 kg (pilote compris), soit 26 kg de plus par rapport à la saison dernière du fait des pneus plus larges et d'une surface de carrosserie plus importante. «Nous, les pilotes, pouvons nous permettre de prendre un peu de poids», explique le Français Romain Grosjean. Un soulagement pour le paddock. Depuis l'arrivée des moteurs hybrides plus lourds en 2014, les pilotes étaient en effet contraints de chasser tout kilo superflu. On estime que chaque kilo supplémentaire correspond à une perte de 0,04 seconde au tour, une éternité pour un pilote de F1. Jenson Button s'était ainsi plaint au Guardian de «devoir jeûner avant chaque grand prix» lorsque Lewis Hamilton montrait sur les réseaux sociaux l'évolution de son poids passé de 73kg à 67 kg lors de l'intersaison 2014. Un défi physique d'autant plus difficile à relever que les pilotes de F1 sont de plus en plus grands, donc plus lourds.

Le Français Jean-Eric Vergne, 1,82 m, a ainsi dû être hospitalisé entre les deux premiers GP de la saison 2014, affaibli par le régime qu'il suivait alors pour perdre des kilos. Si le nouveau règlement soulage les pilotes quant à leur poids, il leur demande toutefois une plus grande préparation physique. Carlos Sainz Junior (Toro Rosso) raconte qu'il a connu «l'hiver le plus rude de sa vie» pour se mettre à niveau. Plus rapides, les voitures seront en effet plus dures à conduire notamment dans les virages où les pilotes vont encaisser une force latérale pouvant aller jusque 6G au niveau du cou.

Un règlement «anti-Verstappen»

Ce nouveau règlement est aussi source de critiques. Pat Symonds, l'ancien directeur de l'écurie Williams estime même qu'il a été écrit de telle sorte que le Néerlandais Max Verstappen, arrivé en Formule 1 en 2015 à seulement 17 ans soit pénalisé : «Ils se sont dit que si les voitures allaient cinq secondes plus vite, elles seraient beaucoup plus difficiles à conduire et qu'un jeune pilote n'en serait pas capable. Mais les faits ont plutôt démontré le contraire.» Symonds pense d'ailleurs savoir qui est derrière ces nouvelles règles : «Je sais que l'idée vient de Bernie (Ecclestone) et elle est passée par le groupe stratégique de la F1. Il s'est senti insulté, à l'origine, qu'un pilote de 17 ans puisse débuter en F1 et réussir.» Un constat notamment partagé par Lewis Hamilton. Le triple champion du monde a ainsi montré son soutien à l'actuel plus jeune pilote du paddock, le Canadien de l'écurie Williams Lance Stroll, 18 ans: «Je compatis avec lui, parce que c'est la pire année pour arriver en Formule 1 : les voitures les plus rapides, les plus physiques, et si peu d'essais.» A 20 ans à peine et pour sa première saison complète en F1 (après 9 GP l'an dernier), le Français Esteban Ocon, désormais chez Force India, devra également faire face à ce nouveau défi.

De plus en plus de «pilotes payants»

Non seulement contraint de devoir faire avec un nouveau règlement qui ne lui semble pas favorable, Lance Stroll est le symbole d'une autre problématique qui touche la F1, les «pilotes payants». L'Equipe rapporte que Lawrence Stroll, son père, auraient déboursé environ 70 millions d'euros – soit à peu près le budget de l'écurie Manor la saison dernière – pour préparer l'arrivée de son fils en F1. Selon l'AFP le nombre de ces pilotes monnayant l'obtention de leur volant se multiplie dangereusement. Outre le Canadien, le Suédois Marcus Ericsson, le Britannique Jolyon Palmer, le Mexicain Sergio Perez parmi d'autres auraient profité de l'apport financier de leurs sponsors pour s'assurer un volant en F1.

Il est vrai qu'avec un budget d'entrée estimé à «70 millions d'euros annuels» selon la Fédération Internationale Automobile (FIA), les écuries les plus modestes sont tentées de prendre des pilotes qui apportent dans leur bagage une manne financière susceptible de les maintenir à flot plutôt que d'autres plus talentueux certes mais sans sponsors. Ces «pilotes payants» ne sont pas pour autant des «chauffeurs du dimanche» et certains d'entre eux n'ont pas eu de mal à prouver qu'ils méritaient amplement leur place au sein du paddock. Mais le doute sera toujours présent.