Rafael Nadal, un champion très bien soigné. Pour la première fois, un pan du dossier médical du tennisman espagnol a été rendu public. C'était vendredi, devant la 17e chambre du tribunal correctionnel de Paris, dans le cadre du procès en diffamation que le numéro 1 mondial intente à Roselyne Bachelot. L'ancienne ministre avait déclaré le 8 mars 2016 dans un talk-show sur la chaîne D8 : «On sait à peu près que la fameuse blessure de Rafael Nadal qui a entraîné sept mois d'arrêt de compétition [en 2012] est très certainement due à un contrôle positif.»
Pour faire valoir sa probité, Rafael Nadal a dégainé une botte secrète : trois attestations médicales que Libération s'est procurées. Sept pages de textes qui, loin de lever tous les doutes, confirment l'état de surmédicalisation du sport et l'ambiguïté de la frontière entre le médicament destiné à guérir et celui qui dope. Il apparaît que Nadal a suivi pendant l'année 2012 un traitement de choc pour soigner la tendinite au genou gauche, qui l'obligera à stopper sa saison après Wimbledon, en juin : une «infiltration de plasma riche en facteur de croissance». Cette technique, réputée pour accélérer la guérison, n'est pas interdite par l'Agence mondiale antidopage qui recommande toutefois de limiter son usage aux cas de blessure - pas pour améliorer les performances.
Rafael Nadal avait déjà révélé avoir employé cette méthode controversée. Ce qui frappe à la lecture des attestations médicales fournies vendredi au tribunal parisien, c’est la longueur du protocole de soin, alors même que le joueur est en activité. Ses médecins, qui citent une dizaine de dates d’injections, font remonter la première séance au 14 décembre 2011 et la dernière au 27 mars 2013. Ce qui n’a pas empêché Nadal (ou ce qui lui a permis) de remporter 42 des 48 matchs qu’il a disputés en 2012.
Dans son jugement, attendu le 16 novembre, le tribunal ne devrait pas tenir compte de ce dossier médical. Le procureur a requis la condamnation de Roselyne Bachelot, absente à l'audience. Son avocat, Me Olivier Chappuis, a longuement détaillé la «culture de l'omerta et de la dissimulation» dans le tennis, et donc «l'inévitable suspicion» qui entoure les performances. «Rafael Nadal n'a jamais été contrôlé positif dans sa carrière», rétorque son avocat, Me Patrick Maisonneuve.
Le tennisman de 31 ans, qui réclame à l’ancienne ministre de la Santé et des Sports 100 000 euros de dommages et intérêts et 35 000 euros de frais de justice, était en Chine ce vendredi, où il s’est qualifié pour les demi-finales du tournoi de Shanghai.