«On est côte à côte dans le vestiaire. Bon, moi, je suis gardien, j'ai pas mal d'équipements alors je m'étale. Il se met alors debout et me regarde avec les yeux mi-clos et un petit sourire, un peu de côté… Benjamin n'est pas… agité. Moi, je suis jeune, je fais tout à 15 000 à l'heure. Je rentre dans toutes les discussions. Ce matin, dans le vestiaire, on s'est demandé si on maîtrisait tout, ta vie, l'éducation des enfants par exemple : j'ai dit que non, tu peux leur donner un idéal mais tu ne sais pas ce qu'ils font entre le moment où ils sortent de l'école et celui où ils rentrent à la maison - ça compte ! On a parlé aussi de [Olivier] Giroud et [Alexandre] Lacazette [en concurrence à Arsenal et chez les Bleus, ndlr]. On n'entend pas trop Benjamin. Il est plus réservé. Quand on a joué contre Dijon en amical cet été, où Corgnet a explosé entre 2010 et 2012, j'ai vu dans les yeux de ceux qui le retrouvaient le reflet d'un mec attachant. Le personnel du club était vraiment content de le voir. Un peu comme moi, quand je suis revenu à Tours [où il a été formé] début septembre : les femmes de ménage me sont tombées dans les bras, il faut dire qu'elles étaient toujours là pour moi comme moi j'étais là pour elles - ce n'est pas parce qu'elles sont payées pour nettoyer que tu dois laisser un vestiaire crade. Benjamin me parle de temps en temps. De son vécu : ce n'est jamais "fais ci" ou "fais ça", ça n'existe pas dans le foot de parler comme ça. Il m'a surtout dit de tout faire pour ne jamais avoir de regret. Benjamin n'est pas passé par un centre de formation, il a un diplôme d'optique. Par la suite, il n'a pas toujours eu le temps de jeu qu'il espérait [dix matchs de Ligue 1 à Saint-Etienne l'an passé, ndlr] : je trouve que son parcours est d'autant plus méritant, une carrière n'est jamais un long fleuve tranquille, même celle de Lionel Messi. La force mentale fait partie du jeu. Et c'est cette force mentale que tu vois quand le joueur est sur le terrain. J'en reviens à son air, quand je prends trop de place dans le vestiaire. C'est plutôt sympa qu'il me regarde comme ça. Mais je fais plus attention quand même (sourire).»
Interview
Benjamin Corgnet (attaquant, 30 ans) vu par Bingourou Kamara «C’est sympa qu’il me regarde comme ça»
publié le 1er décembre 2017 à 19h56
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