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Coupe du monde 2026 : l’Amérique du Nord favorite, le Maroc y croit

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Qui du trio Etats-Unis-Mexique-Canada ou du royaume nord-africain organisera le Mondial de football ? Verdict ce mercredi à Moscou. L’ombre de Donald Trump planera sur le vote.
(Photo Miguel Medina. AFP)
publié le 13 juin 2018 à 6h23

C’est jour de scrutin à la Fifa. A la veille du lancement du Mondial russe, les membres de la Fédération internationale de football, réunis en congrès à Moscou, vont choisir qui accueillera la Coupe du monde en 2026, la prochaine (en 2022) ayant déjà été attribuée, non sans polémique, au Qatar.

Pour la première fois, et à raison d’une voix chacune, toutes les fédérations membres de la Fifa sont appelées à se prononcer, à l’exception des quatre pays candidats (Maroc, Etats-Unis, Mexique et Canada), exclus du vote. Jusqu’à présent, le choix du pays organisateur incombait à la vingtaine d’élus du comité directeur de la Fifa. Un système peu transparent et favorisant la corruption, d’où la réforme adoptée en 2013 par l’organisation.

Qui, donc, accueillera dans huit ans le premier Mondial à 48 nations ? Depuis le début du processus, la candidature nord-américaine, qui regroupe les Etats-Unis, le Mexique et le Canada, fait figure de favorite. Ses atouts sont évidents : des stades grands, modernes, et en majorité déjà construits ; des transports fiables ; et l’expérience des grands événements, sportifs ou pas.

Bénéfices records

En outre, les promoteurs du dossier nord-américain, baptisé «United 2026», promettent à la FIFA des recettes sans précédent : 14 milliards de dollars de chiffre d'affaires attendus (11,8 milliards d'euros), dont 11 milliards de bénéfices pour la Fifa, près de quatre fois plus qu'en 2014 au Brésil. De quoi séduire les fédérations nationales, en partie financées par la fédération internationale.

Face au trio nord-américain, le Maroc ne fait pas de complexe. Sa candidature, examinée par un comité d'experts de la Fifa, a certes obtenu une note technique moyenne (2,7 sur 5) et nettement inférieure à celle de ses rivaux (4 sur 5). Mais une note inférieure à 2 aurait été synonyme d'élimination, ce que certains pessimistes promettaient au royaume chérifien.

Autorisé à défendre jusqu’au bout sa candidature, Rabat fait désormais trembler le trio adverse. Il faut dire que les atouts marocains sont à prendre au sérieux, à commencer par son positionnement géographique stratégique, entre Europe et Afrique. A elles seules, les deux confédérations rassemblent près de 110 votants, davantage que la majorité nécessaire de 104 voix.

Infrastructures

A l'opposé du mastodonte nord-américain (Edmonton et Mexico City, deux des villes hôtes de «United 2026», étant par exemple distantes de près de 5 000 kilomètres), le Maroc offre une candidature compacte, à taille humaine, où tous les matches se joueront dans un rayon de 550 kilomètres autour de Casablanca, la capitale économique du pays. De quoi faciliter la vie aux joueurs comme aux fans.

Déjà candidat malheureux à quatre reprises à l’organisation de la Coupe du monde de football, le Maroc aura fort à faire sur le plan des infrastructures. Sur les douze stades prévus, cinq sont à moderniser et trois à construire. Les infrastructures hôtelières, routières, ferroviaires et aéroportuaires devront également être améliorées. Mais Rabat dispose d’autres atouts incontestables par rapport à ses rivaux : coût de la vie plus faible, monnaie et fuseau horaire uniques, vive ferveur footballistique.

Ingérence

Enfin, l’atout clé et inattendu du Maroc pourrait se nommer… Donald Trump. Certaines décisions, déclarations ou projets du président américain (restrictions sur l’octroi des visas, insultes envers les immigrés mexicains et certains pays africains et caribéens, projet de mur à la frontière mexicaine, remise en cause de l’Accord de libre-échange nord-américain avec le Canada et le Mexique, et, tout récemment, accrochage avec le Premier ministre canadien Justin Trudeau) ont écorné l’image des Etats-Unis et affaibli la candidature «unie» des trois voisins.

Dans une tribune publiée fin février, le journaliste de la chaîne sportive ESPN, Sam Borden, résumait ainsi les enjeux : «La question la plus complexe pour la candidature nord-américaine est en fait quelque chose de remarquablement simple : à ce moment précis, le monde a-t-il envie d'offrir un joli cadeau aux Etats-Unis ?»

Conscient du risque de défaite à laquelle il ne serait pas étranger, Donald Trump a publiquement menacé de représailles, notamment sur Twitter, les pays qui ne soutiendraient pas la candidature américaine. D’ordinaire prompte à dénoncer toute ingérence politique dans le football, la FIFA n’a pas réagi. Un silence jugé complice, en coulisses, par le Maroc et ses alliés.

Sans doute plus intéressé par la victoire que par le football, Donald Trump (qui, en cas de réélection, quittera la Maison Blanche en janvier 2025), s'est en tout cas activement impliqué pour la candidature au Mondial de 2026. Mardi, le New York Times a ainsi révélé que le président des Etats-Unis avait adressé trois lettres à celui de la Fifa. Dans la plus récente, début mai, il assurait Gianni Infantino que «tous les athlètes, officiels et fans de tous les pays seraient autorisés à entrer aux Etats-Unis sans discrimination». Reste à savoir si les promesses de Donald Trump, connu pour son inconstance, suffiront à convaincre une majorité de membres de la Fifa.