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Libération
Billet

Déjà dans le match

Coupe du monde 2018dossier
A Paris, dimanche matin. (Photo Charly Triballeau. AFP)
publié le 15 juillet 2018 à 12h29

Une journée particulière. Dès le réveil, quelque chose d’indicible nous alerte. On ne sait pas pourquoi, mais il flotte dans l’air un parfum pas ordinaire. Bien sûr, la ville est calme comme un dimanche de juillet, mais nos sens sont en éveil, à la recherche de ces petits signes qui confirmeront que oui, cette journée n’est pas, ne sera pas, une journée comme les autres. Un peu comme ces dimanches d’élection présidentielle.

Les signes ? Ce plaisir d’abord de traverser un Paris à la circulation qui semble plus paisible qu’un dimanche normal. Impression que les gens roulent plus lentement. Vrai ou faux, peu importe, c’est le sentiment qui compte. Et il y a cette voiture arrêtée où elle ne devrait pas. Son propriétaire négocie avec un vendeur l’achat d’un drapeau bleu blanc rouge. Il est 9h30 du matin. Et puis ce couple en scooter, drapeau tricolore encore qui flotte déjà au vent. Où vont-ils ? Peut-être profitent-ils simplement de ce désert urbain inhabituel.

Il y a cet homme aussi qui s’installe à la table d’à côté lors de notre pause café-croissant. On s’amuse de voir qu’il a soigné son look. Pas de maillot, mais un ensemble T-shirt bleu, pantalon rouge aux couleurs du jour, manière de dire timidement «j’en suis». Et ça marche, le serveur le moque gentiment en lui disant que sa tignasse blanche, il faudrait qu’il la déplace sur le gras de son ventre pour respecter l’ordre des couleurs. Dans les minutes qui suivent, on comprend en prêtant l’oreille que sa femme, téléphone en main, lui donne les dernières nouvelles de Moscou. Dans le match, déjà.

Le serveur, lui, porte le maillot de l’équipe de France. Version blanc. La serveuse aussi, version bleue. Une vieille dame s’approche, réclame une cigarette, offerte avec une gentillesse inhabituelle. Avec la serveuse, au moment de payer, pas besoin de mots, nos regards suffisent pour se dire «bon match».