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Libération
Chronique «OM sweet OM»

Mais pourquoi donc l'OM commence son championnat contre Toulouse et Nîmes ?

Cette saison, notre correspondante à Marseille raconte les petites et grandes histoires du club phocéen et de la ville construite autour. Episode 1, le calendrier.
Dans les tribunes du stade Vélodrome, lors du premier match de la saison remporté 4-0 face à Toulouse, le 10 août. (Photo Boris Horvat. AFP)
par Stéphanie Harounyan, correspondante à Marseille
publié le 18 août 2018 à 17h06

Clint Eastwood a dit : «Le monde se divise en deux catégories : ceux qui ont un pistolet chargé et ceux qui creusent.» Et bien tu vois, Clint, le monde journalistique à Marseille, c'est pareil : il y a ceux qui couvrent l'OM et ceux qui creusent. Ça fait plus de trois ans que je laboure le terrain marseillais pour Libé. Le foot, je n'y touche que pour les grandes occasions, version ambiance et supporteurs. Un service minimum assumé jusqu'à cette nuit de mai, défaite sous ma couette après une nuit d'euphorie et l'échec olympien en finale de l'Europa League : moi aussi, je voulais avoir mon pistolet chargé. D'où l'envie de suivre cette saison le championnat à travers une chronique. D'accord, je n'y connais pas grand chose en foot, en dehors de ce que m'a offert mon capital génétique – je suis made in Marseille. Mais je pourrais raconter la vie du club, m'intéresser aux petites histoires, au hors jeu en somme. Alors j'ai mis mon chapeau de cow-boy, j'ai demandé ma carte de journaliste sportive, mon accréditation pour la Commanderie – le centre d'entraînement de l'OM – et j'ai attendu, comme les autres initiés, que soit révélé le calendrier des matchs de la Ligue 1 Conforama.

Le verdict est tombé le 7 juin. Première journée le 10 août pour l'Olympique de Marseille, qui affronte au Vélodrome... Toulouse. De quoi ? Toulouse, pour ma première fois ? Pardon, lecteur du Sud-Ouest, mais un match OM-Toulouse, ça sonne un peu comme un premier rencard à dîner à la caféteria de Conforama. Et ils sont où, les Parisiens, les Lyonnais et autres brutes et truands du championnat ? Mathieu Grégoire,  correspondant de l'Equipe à Marseille et copain dans la vraie vie, est le premier auprès de qui j'ai râlé. «Normal, m'a rétorqué mon nouveau maître Jedi. En début de championnat, les grosses équipes rencontrent toujours des plus faibles qu'eux. C'est comme ça que le calendrier est fait.» Par saint Eastwood, tout cela n'aurait donc rien à voir avec le hasard ?

Pour comprendre, j'ai questionné la Ligue de football professionnel, en charge du dossier. En matière de calendrier, la France fait figure d'exception en Europe. Aléatoire chez les Italiens, soumis aux deux seuls leaders du championnat pour l'Espagne, le montage du calendrier découle chez nous d'une équation complexe, où différentes parties ont leur mot à dire. A commencer par les clubs, interrogés dès avril sur leurs souhaits pour la saison qui suit. Chaque club dispose d'un quota de 100 points à dispatcher à sa convenance en cinq vœux – 200 points et dix vœux pour les équipes engagées dans une compétition européenne. La règle, un vœu par journée, et pas question de choisir un adversaire précis: en fonction du classement de la saison précédente, la Ligue répartit les clubs en trois catégories : le top 6, les équipes du 7e au 13rang, puis la queue du championnat avec les accédants. Les clubs peuvent ainsi miser sur une journée et sur une catégorie de clubs. Viennent ensuite les souhaits du diffuseur télé pour la case premium – Canal+ en France jusqu'en 2020. La chaîne émet des voeux pour les matchs du top 10, afin qu'ils soient programmés à sa convenance, le dimanche soir. Cette année, par exemple, c'est à Canal que l'on doit le OM-PSG de la 11journée ou le Lyon-Marseille de la 6e.

L'ensemble des contraintes voyage ensuite jusqu'aux Etats-Unis où depuis deux saisons, les ordinateurs de la société Got Soccer ont pour mission de pondre des propositions de calendrier intégrant le maximum de souhaits. Une fois le Tetris accompli, la LFP n'a plus qu'à apporter quelques ajustements de dernière minute, s'assurant que l'ensemble soit homogène et que chaque journée ait son lot de suspens, avant de soumettre le tout au vote de son conseil d'administration. Et c'est généralement mi-juin que le calendrier est prêt à être dégainé. Pas étonnant, avec ce système, que l'on se retrouve sur les premières journées avec des duels entre petits et gros clubs, ces derniers préférant démarrer doucement pour se mettre en jambes. D'où, ce dimanche encore pour la deuxième journée, un déplacement des Olympiens à Nîmes, propulsé en L1 après un quart de siècle coincé en L2. «Et ça va être difficile, face à un promu survolté pour un premier match à domicile», a prévenu Rudi Garcia, le coach marseillais, à l'issue du match contre Toulouse (4-0 pour ses tireurs). Traduction, en langage Clint : ne jamais désarmer, sinon tu creuses.