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1927, les Quatre Mousquetaires du tennis français s’emparent de la Coupe Davis

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L'équipe de France de tennis a remporté dix fois la Coupe Davis. Son premier saladier d'argent, elle la doit à ses Quatre Mousquetaires en 1927. Une victoire évidemment relayée abondamment dans la presse de l'époque.
Les Quatre Mousquetaires et leur capitaine Pierre Gillou (au centre) dans le journal «Excelsior» du 23 septembre 1927. (Photo DR)
publié le 23 novembre 2018 à 11h03

Ce week-end, l'équipe de France de tennis, tenante du titre, va tenter de conquérir sa onzième Coupe Davis. Plus de quatre-vingt-dix ans après le premier saladier d'argent glané en 1927 par un quatuor resté légendaire. Borotra, Brugnon, Cochet, Lacoste : les Quatre Mousquetaires. En face, les redoutables Américains, pourtant septuples tenants du titre. La France s'imposera au bout du troisième jour, 3-2.

«Enfin, la Coupe Davis est à nous»

Le lendemain, le quotidien l'Intransigeant revient sur l'exploit qui s'est déroulé à Philadelphie : «Enfin, la Coupe Davis est à nous.» Jusque-là, depuis 1900, seuls trois pays l'avait remportée : la Grande-Bretagne, l'Australie et les Etats-Unis. Mais les joueurs français tracent leur route petit à petit vers la victoire, dans les années 20, comme le raconte le journal : «Lacoste, Borotra, Cochet et Brugnon, tout d'abord aguerris par la dure école des tournois de Wimbledon, progressaient d'année en année comme par miracle.»

L'Intransigeant rappelle ainsi comment la France a défait les patrons du tennis mondial les uns après les autres, d'abord les Anglais, puis les Australiens et enfin les Américains. «Battus la première année par cinq victoires à rien, ils firent un peu mieux l'année suivante puisqu'ils remportèrent, en vertu du succès de Lacoste sur Tilden, une victoire sur cinq et enfin voici qu'ils viennent de détrôner ceux qui régnèrent si longtemps sur le monde du tennis en les battant trois victoires contre deux.»

Le quotidien le Journal raconte, lui, dans son édition du 25 septembre 1927, le retour en France du trophée et des champions, Henri Cochet et son capitaine Pierre Gillou, revenus quelques jours avant leurs trois camarades. L'arrivée se fait au Havre, à bord du paquebot France : «De bon matin, le France comme amené doucement du large par le grand vent est venu virer du nez dans le grand bassin, devant les docks de planches rouges, écrit le journaliste Paul Bringuier. Quand il a été tout près, d'un hublot du premier pont deux bras ont tendu vers la terre une sorte de vase large et qui luisait au jour gris. C'était la Davis Cup.»

Le trophée et son «charme d’un autre âge»

Venus accueillir le tennisman sur le quai, «une douzaine de personnes, la tête rentrée dans le col du pardessus, à cause de l'embrun glacé, et dont l'une cachait derrière son dos un petit bouquet de roses rouges». Le Journal fait ensuite le récit de la réception en l'honneur, notamment, du discret Mousquetaire, «toujours vêtu de gris et toujours effacé». Le trophée est là aussi : «Elle a le charme d'un autre âge, d'ailleurs, cette coupe, solide et sans style. Sur son ventre d'argent, il n'y a pas une figure, pas une allégorie ; seulement le nom de l'honorable M. Davis et celui des nations qui l'ont conquise.»

Le capitaine Pierre Gillou détaille les ressorts de la victoire : «Nous avons battu les Américains à force de volonté et de méthode. Ils ont voulu gagner le match avec le seul Tilden. Nous avons su leur opposer quatre hommes qui, en se relayant, ne perdaient rien de leurs ressources.» Cochet, «d'une voix un peu émue», raconte, lui, les instants décisifs de la rencontre : «A bout de résistance nerveuse, je voyais les balles filer devant ma raquette. En regardant vers les tribunes, j'aperçus ma femme qui pleurait, mes camarades qui me regardaient en serrant les dents. N'entendant plus que comme dans un rêve la clameur de la foule je m'acharnai sur la petite boule blanche.»

Ce sera finalement son adversaire qui lui donnera le point de la victoire, avec une balle restée dans le filet. «Nous n'avions plus qu'à passer chez le bijoutier qui avait la garde de la coupe. Et me voilà avec elle.» Ce trophée, les Mousquetaires le garderont jusqu'en 1932, enchaînant six victoires. La France ne soulèvera de nouveau le saladier d'argent qu'en 1991, avec la victoire mémorable de Forget, Leconte, Boetsch et Santoro. Puis de nouveau en 1996, 2001, et finalement 2017. Avant 2018 ?