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Rugby : France-Ecosse, gagner ou régler les fractures

Dans un climat délétère, les Bleus rencontrent le XV du chardon ce samedi au Stade de France pour le Tournoi des six nations. Une victoire obligatoire pour s’éviter une fin de compétition anxiogène.
L’entraîneur du XV de France, Jacques Brunel, à Marcoussis le 6 février. (Photo by Johnny Fidelin. Icon Sport)
publié le 22 février 2019 à 20h06

«Rarement une équipe de France s'est présentée aussi solide, aussi bien équilibrée, aussi rapide.» Cette analyse n'est malheureusement pas celle d'un observateur contemporain du XV de France. Tirée du quotidien sportif l'Auto, elle remonte au 1er janvier 1920, avant le match de football-rugby opposant la France et l'Ecosse au Parc des princes. Cette rencontre était la première organisée par la Fédération française de rugby (FFR), qui a vu le jour le 13 mai 1919. Elle s'était soldée par une courte défaite des Bleus (0-5).

Correction

Près de cent ans plus tard, la FFR espère que le dénouement sera différent (samedi, 15 h 15 au Stade de France) face aux Ecossais. L'affiche a été choisie pour lancer les célébrations, et il serait de bon ton pour les Bleus de gagner ce «match du centenaire». Un show pyrotechnique est certes prévu pour «enflammer le public» après la rencontre, mais les spectateurs français, attendus en nombre samedi, aimeraient voir les Bleus faire des étincelles sur le terrain. Un désir partagé par les joueurs après leur incompréhensible revers contre le pays de Galles (19-24) et la correction reçue à Twickenham (8-44). Une victoire aurait d'autant plus de saveur pour eux qu'en battant l'Ecosse, ils s'éviteraient une fin de compétition anxiogène, avec deux déplacements, en Irlande puis Italie.

Les joueurs ont obtenu de l'encadrement plusieurs changements dans leur préparation. Les passages devant les médias se sont faits plus brefs et le sélectionneur, Jacques Brunel, a annoncé dès mardi, au lieu de jeudi, la composition de l'équipe. Des aménagements nés après le revers contre les Anglais qui ont aussi porté sur le capitanat, assumé par le vaillant talonneur Guilhem Guirado. «Il y a eu un rassemblement autour du capitaine pour savoir comment faire plus et avoir cette détermination de montrer le vrai visage de l'équipe de France», a expliqué Jacques Brunel. Dans son sillage, les joueurs ont répété que Guirado gardait la confiance de tous. Mais Guirado ne sera désormais plus seul à faire l'interface puisqu'un «conseil des joueurs» a été créé pour améliorer la communication. Parmi ses huit membres se trouvent des internationaux expérimentés, tels Louis Picamoles ou Mathieu Bastareaud, et des néo-Bleus. Picamoles était d'ailleurs vendredi au côté de Guirado lors la conférence de presse du capitaine.

Par ailleurs, Brunel n'a pas souhaité commenter les discussions au sein du groupe, ni la teneur des échanges à Marcoussis avec le président de la FFR, Bernard Laporte. «C'est notre fonctionnement interne, cela reste entre nous», a expliqué Brunel cette semaine. Le sélectionneur, qui affiche un bilan famélique de 3 victoires en 13 matchs, affirme ne se concentrer que sur la prochaine échéance sportive, sans s'interroger sur son avenir à la tête des Bleus. Et quand l'hypothèse de l'arrivée de Fabien Galthié en renfort lui est soumise, il affirme ne pas être au courant, ajoutant qu'il vit bien avec son staff composé de Julien Bonnaire, Sébastien Bruno et Jean-Baptiste Elissalde.

«Naufrage»

Cette osmose de façade tranche avec le climat tendu qui régnait après la déconvenue face aux Anglais : le demi de mêlée Morgan Parra regrettait «le manque de travail» et la mauvaise préparation des Français, tandis que l'ouvreur Camille Lopez estimait que les joueurs n'étaient pas les seuls à avoir fait «naufrage» à Twickenham. Des critiques nettement dirigées contre les entraîneurs en poste depuis janvier 2018. Brunel ne se sent pas visé pour autant et regrette que ces déclarations aient été sorties de leur contexte. Il refuse de parler de sanctions pour expliquer les évictions de Parra et Lopez face aux Ecossais, assurant que ces choix s'expliquent par leur prestation décevante face aux Anglais.

Les Bleus se retrouvent du coup avec une nouvelle paire de demis, la septième charnière de Brunel en 14 matchs. Romain Ntamack hérite du numéro 10, un poste que cet ouvreur de formation n'occupe pas cette saison en club. Brunel mise sur sa fraîcheur et son talent pour assurer l'animation offensive, avec l'aide de l'intenable demi de mêlée Antoine Dupont. Ancien international, Richard Dourthe espère que ces deux jeunes, qui brillent cette saison au Stade toulousain, démontreront toutes leurs qualités contre l'Ecosse. «Beaucoup de joueurs n'ont pas le même rendement chez les Bleus qu'en club. Je ne les reconnais pas avec les maillots bleus», lâche ce consultant, aussi dur dans ses interventions médiatiques que lorsqu'il jouait. Il a notamment sévèrement critiqué Guirado après le crunch. Le capitaine a réagi vendredi en précisant être «rancunier à mort». Mais il répondra plus tard. Pour l'heure, c'est sur le pré que le capitaine et ses hommes veulent réussir à s'exprimer. «Les joueurs doivent prendre conscience qu'ils ont encore une chance de repartir de l'avant», estime Richard Dourthe. A eux de ne pas la rater contre l'Ecosse, un adversaire redoutable malgré l'absence de nombreux joueurs.