Julian Alaphilippe continue son Tour de France sur hydroglisseur. A l’aube d’un week-end dans les Pyrénées, le Français a remporté vendredi un contre-la-montre vallonné autour de Pau, repoussant son dauphin, le vainqueur sortant et ancien pistard Geraint Thomas (Team Ineos), à 1’26" au classement général. Il signe la première victoire française dans un chrono long depuis Jean-François Bernard en 1987. Voilà surtout Alaphilippe, 27 ans, nanti d’un matelas de plus en plus douillet par rapport à ses poursuivants, alors qu’il s’apprête à vivre ce samedi dans les pentes du Tourmalet sa neuvième journée en jaune.
«Limites»
«C'est incroyable, même si sans prétention, je savais que je pouvais bien faire sur un parcours comme ça, a réagi le leader de la Deceuninck-Quick Step. J'ai repoussé mes limites, il y avait tellement de folie que j'ai tout donné.»
A force de jouer avec ses «limites», où va s'arrêter Alaphilippe ? Capable de gagner sur les classiques vallonnées (la Flèche wallonne, les Strade Bianche) voire au sprint massif sur Tirreno-Adriatico, le Bourbonnais est-il en mesure de s'incruster sur le podium de cette 106e Grande Boucle ? La question commence à titiller le Team Ineos, lauréat de six des sept dernières éditions. «Si Alaphilippe continue comme ça, il sera en jaune à Paris», avertit Geraint Thomas. A moins que du côté britannique, on ne se rassure en contemplant le reste de la concurrence : Thibaut Pinot (Groupama-FDJ), pourtant auteur d'une solide performance vendredi, pointe à deux minutes du lauréat de 2018 ; Nairo Quintana (Movistar) à 2'30'' ; Jakob Fuglsang (Astana) à trois minutes.
«Gruppetto»
Samedi, le peloton passera au premier révélateur en altitude, en enchaînant le Soulor (1 474 m) et le Tourmalet (2 115 m), avant un exigeant parcours ariégeois dimanche, qui se terminera par une montée inédite au-dessus de Foix, le Prat d'Albis. Loin derrière, les sans-grades s'avancent perplexes. «Samedi, ce sera une énorme bataille parce que l'étape est courte [117 kilomètres, ndlr] et que les délais pour rejoindre l'arrivée seront serrés, confie Anthony Perez, le Toulousain de Cofidis. Heureusement que j'ai réussi à me débarrasser du virus qui me suivait depuis plusieurs jours, parce que sinon je pouvais rentrer directement à la maison. Au pied du Tourmalet, ça sera une course de bourrins. Les favoris vont attaquer la montée au sprint.» Florian Vachon (Arkéa-Samsic) tente de se rassurer : «Ça ne sera pas très différent d'un contre-la-montre, finalement. Quand on est seul dans un col, à souffrir, c'est le même type d'effort.»
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Son coéquipier Maxime Bouet ne redoute pas seulement les pentes flirtant parfois avec les 10 % : «Il faudra rouler à fond dans la descente du Soulor et la vallée qui précède le Tourmalet, puisque la dernière mode du cyclisme est de faire les descentes à fond…» Plus philosophe, le Belge Oliver Naesen (AG2R La Mondiale) sait qu'il suivra le show d'Alaphilippe & co de loin. «Mais comme je ne fais pas partie des pires grimpeurs, j'aurai presque le luxe de choisir un gruppetto [un petit peloton de coureurs attardés, ndlr] qui est sûr de finir dans les délais.» Un bonheur simple.