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Cyclisme

Le directeur de course positif au Covid-19, le Tour de France toussote

Tour de France 2020dossier
Christian Prudhomme, le patron de l'épreuve cycliste, a été contrôlé positif au coronavirus et se met en retrait pour huit jours. L'ensemble du peloton, testé négatif, peut en revanche reprendre sa route.
Le directeur du Tour de France Christian Prudhomme, à Nice, le 19 août. (Photo Valery Hache. AFP)
publié le 8 septembre 2020 à 14h44

Le Tour semblait bien rouler jusqu'à ce qu'on apprenne, ce mardi, que le taulier Christian Prudhomme avait attrapé le Covid. «Pour l'image du Tour, c'est grave», nous indique un coureur étranger par texto, à trente minutes de s'élancer dans la dixième étape qui se déroule entre l'île d'Oléron et l'île de Ré. «Grave» en effet, parce que le patron du Tour incarne le Tour. Et que le Tour de France symbolise la France (en témoignent les ministres présents sur presque chaque étape, dont le premier d'entre eux, Jean Castex, samedi dans les Pyrénées). «Je sors du Tour pour huit jours, déclare l'ancien journaliste, 59 ans, qui est positif mais asymptomatique. Je vais faire comme n'importe quel salarié français dans ce genre de cas.» Prudhomme tousse et le Tour de France menace de s'aliter avec une poche à glaçons.

L’autre conséquence désastreuse de cette nouvelle sanitaire, confirmée par l’organisation, c’est le risque de contagion potentielle. Le patron de l’épreuve, toujours impeccablement doté d’un masque, affirme qu’il n’était pas membre de la «bulle course», même s’il a été aperçu à de nombreuses reprises à proximité de la ligne de départ ou dans la zone du podium à l’arrivée. Il était en revanche omniprésent dans le village départ chaque matin, muni d’un masque chirurgical, pour s’entretenir avec les partenaires économiques et les élus locaux. Et en voiture samedi, avec Jean Castex.

Une «bulle» percée ?

Pour le reste, le peloton est déclaré à 100% apte au service. Les quelque 650 tests pratiqués dimanche et lundi sur les coureurs et membres d’encadrement des 22 équipes participantes se sont quasiment tous révélés négatifs. Seuls quatre membres d’équipes (pas des coureurs), appartenant à quatre équipes différentes (Ineos, AG2R La Mondiale, Cofidis, Mitchelton), ont été recalés et ont dû quitter la «bulle course».

Un soulagement collectif puisqu'une formation sportive présentant deux cas positifs est menacée d'exclusion, selon un protocole sanitaire validé par le gouvernement. Quand on pense que les Belges de Lotto-Soudal s'étaient retrouvés avec trois covidés avant le départ de Nice, il y a dix jours… Qu'au moins cinq formations (Ineos, Israel Start-Up Nation, Bora-Hansgrohe, Trek-Segafredo, AG2R La Mondiale, etc.) ont annoncé enregistrer des cas de coronavirus parmi leurs coureurs sur d'autres épreuves cet été… L'affaire n'était pas tout à fait gagnée. Quoique.

Le risque d'une équipe limogée était-il si fort ? Oui, si l'on se figure que la «bulle course» est percée. Que le peloton a grimpé des cols jeudi et samedi, à travers des haies de spectateurs en large partie sans masque ; que les mêmes coureurs croisent des clients, plus ou moins à distance, dans les hôtels où ils sont logés et où, en théorie, les organisateurs le jurent, ils sont censés être placés à isolement. L'éventualité d'une contagion est encore plus élevée chez la trentaine de membres d'encadrement (directeurs sportifs, mécaniciens, ostéos et kinés, assistants, attachés de presse, etc.), qui peuvent faire un arrêt jambon-beurre à la boulangerie du coin, converser avec certains journalistes ou partenaires…

Protocoles draconiens

Sauf que de nombreuses équipes avaient anticipé les tests officiels, en soumettant vendredi leurs coureurs et staff à un contrôle PCR interne. Elles savaient que leurs troupes étaient négatives. Les organisateurs avaient été placés dans la confidence. Ce qui pouvait faire dire, lundi, à l'ancien maillot jaune Julian Alaphilippe, de l'équipe Deceuninck-Quick Step, qu'il attendait les résultats «sereinement».

D’autres équipes se raccrochaient à leurs protocoles de sécurité draconiens, censés éviter toute probabilité de contagion. Au Team Ineos, cette bulle de protection décidée en interne porte le nom «Zero Days : Covid Plus». Laquelle a consisté, grosso modo, à recruter un second cuisinier pour ce Tour de France : l’un préparant uniquement les repas des coureurs, l’autre ceux de l’encadrement. Car pour le reste, le Team Ineos fait du Ineos. L’armada, montée en 2010, a depuis plusieurs années disposé du gel hydroalcoolique dans tous les espaces d’accès de ses coureurs, désinfecté les chambres d’hôtel, transporté ses propres matelas et oreillers – mesures reprises par d’autres équipes depuis – et interdit les poignées de main (et la bise). Ineos se protégeait contre le Covid avant le Covid.