A l’issue d’un contre-la-montre où il allume sa dernière mèche, violente, étourdissante, Tadej Pogacar, 21 ans, déclare : «J’ai l’impression que ma tête va exploser.» Samedi, à la planche des Belles Filles (Haute-Saône), le leader du Team UAE-Emirates vient de décoiffer le public du Tour de France autant que son rival et compatriote Primoz Roglic – et lui-même au passage. Il parade ce dimanche (une ultime étape remportée par Sam Bennett, de Deceuninck-Quick Step) sur les Champs-Elysées habillé d’un maillot jaune. Cache en dessous celui à pois du meilleur grimpeur, le blanc du meilleur jeune. Le Slovène est un gourmand. Il est le plus jeune vainqueur de l’épreuve depuis 1904 et détrône le Colombien Egan Bernal (Ineos), qui a abandonné la course sur blessure.
Pendant trois semaines, Tadej Pogacar a agi en ado espiègle, rétorquant aux brimades des Jumbo-Visma seul, sans équipier ou presque. Dans le col de Peyresourde, il s'enfuit au loin, personne n'arrive à le rattraper, et il rétablit ainsi la moitié de la minute qu'il a perdue sur les favoris la veille. Il avait crevé au moment même où le peloton se déchirait sous l'effet du vent. Dans le col de Marie-Blanque, il remporte la première de ses trois étapes pour son premier Tour. Efface les favoris un à un, donne un coup de vieux à Egan Bernal, deux ans plus vieux que lui. Jusqu'à rayer de la carte Primoz Roglic, le boss final impassible. «Tamau Pogi», un lutin en slovène, joue au vélo. Son ami d'enfance Jaka Primozic racontait à Libération : «Tadej mange ce qu'il veut, dort quand il veut, se lève pour s'entraîner quand il veut. Il peut s'arrêter pisser à 5 kilomètres du dernier col de la dernière étape du Tour de l'Avenir et défendre son maillot jaune.»
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Le troisième du dernier Tour d’Espagne, vainqueur également du Tour de Californie, est encadré chez UAE Emirates par Mauro Gianetti et Matxin Joxean Fernandez, anciens responsables de l’équipe sponsorisée par les chaudières Saunier Duval. Ce qui nous rappelle le Tour 2008 et leur exclusion après le contrôle positif de Ricardo Ricco à l’EPO. Cet entourage, ses performances de haut vol… Il n’en faut pas plus pour que les rumeurs de dopage bruissent. Lui répond : «Mes capacités de récupération du point de vue génétique sont vraiment remarquables. J’imagine qu’il faut que je remercie mes parents.»