Le Tour d'Italie cycliste s'est trouvé un poète aussi maudit que lui, le Britannique Tao Geoghegan Hart, 25 ans, l'homme qui décrit le cyclisme comme «un art mystique». Un jour, peut-être, il se mettra de l'encre plein les doigts, comme il en a longtemps bu à la bouteille, adolescent romantique, pour raconter avec ses propres mots une fuite paniquée de trois semaines à travers l'Italie, des temples brûlants de Sicile à la neige qui cisaille des Alpes. Près de 3 500 kilomètres et 85 heures d'un cri plaintif pour se présenter samedi soir en premier ex aequo au classement, à égalité avec l'Australien Jai Hindley. Tous ces efforts, jusqu'ici, avaient-ils été vains ? Dimanche, le contre-la-montre de 15 kilomètres à Milan, au pied d'une cathédrale éteinte, a réglé le sort de la course.
Geoghegan Hart, une tête endormie, un corps long en jambes à la Fausto Coppi, en réchappe vainqueur. Le coureur de l'équipe Ineos gagne le 103e opus du Tour d'Italie devant deux adversaires du Team Sunweb, Jai Hindley (à 38 secondes) et Wilco Keldermann (à 1'29"). Dans ce futur écrit, il pourra aussi dire le chaos, la peur animale, la foi perdue d'un peloton peu à peu avalé par la Covid-19 et d'une course en perpétuel suspens, dans un pays qui pleure 37 000 morts, et dont la capitale du Nord, Milan, a décrété un