«C’est la reine de ces Mondiaux, elle est extraordinaire à tous points de vue, surtout sur sa façon de gérer ses émotions. Rien ne la perturbe.» Quand il s’agit de faire l’éloge de la biathlète française Julia Simon, l’entraîneur de l’équipe de Norvège, Siegfried Mazet, ne fait pas dans la demi-mesure. Il faut dire que la skieuse de 27 ans a éclaboussé de son talent les championnats du monde de biathlon à Nove Mesto, en République tchèque, qui se sont achevés ce dimanche 18 février. Sur le relais mixte, le sprint, la poursuite et le relais féminin, elle a conquis la première place, devenant d’ores et déjà la biathlète française la plus titrée de l’histoire des Mondiaux, avec six médailles d’or. Au palmarès national de la discipline, seuls la devancent Raphaël Poirée (huit titres) et l’inamovible Martin Fourcade (treize titres).
«Mon nom a été utilisé à mon insu»
Julia Simon revient pourtant de loin. Au mois d’octobre, la native d’Albertville était placée en garde à vue dans le cadre d’une enquête pour escroquerie à la carte bancaire, vol et abus de faiblesse. Visée par deux plaintes déposées en 2022, l’athlète est accusée d’avoir utilisé la carte bancaire de sa coéquipière Justine Braisaz-Bouchet, championne olympique formée comme elle au club de la station savoyarde des Saisies, pour des achats en ligne de matériel high-tech d’un montant estimé entre 1 000 et 2 000 euros. L’intéressée dément. «Je suis aussi victime de cette situation. Mon nom a été utilisé à mon insu», expliquait-elle en août dans un entretien au site Ski Chrono, qui appartient au Dauphiné libéré. Mais l’affaire a empoisonné les relations entre les deux prodiges et plombé le début de saison de Julia Simon. Fin novembre, la médaillée d’argent des JO d’hiver de Pékin avait fini seulement 31ème de la première course individuelle de la saison, à Östersund, en Suède. «Je suis cuite mentalement», avait-elle admis, dépitée.
Ces doutes appartiennent désormais au passé. A Nove Mesto, la skieuse a fait preuve d’une domination insolente, et manqué de peu d’établir une performance inédite dans l’histoire du biathlon : quatre victoires sur les quatre compétitions individuelles, le grand chelem. Sacrée lors du sprint, le 9 février, puis lors de la poursuite le lendemain avec une avance écrasante, Julia Simon a échoué lors de l’individuel, le 14 février, en raison d’un tir manqué qui l’a repoussée à la troisième place. Ce dimanche, ses championnats du monde se sont achevés par une quatrième place lors de la mass-start – une épreuve remportée par… Justine Braisaz-Bouchet. Sa seule course sans podium en République tchèque.
«Je suis aux anges»
«Je n’aurais jamais imaginé faire des championnats du monde aussi incroyables. Je suis aux anges. […] Je pense que je ne prends pas complétement conscience des choses. C’est fou, c’était mon objectif de saison. De l’avoir annoncé, je suis arrivée avec pas mal de pression. Avoir su gérer ces émotions j’en suis très fière», se réjouissait samedi après son triomphe lors du relais féminin l’athlète, par ailleurs passionnée de menuiserie. Une voie dans laquelle elle envisage de se reconvertir à l’issue de sa carrière sportive. Pour Julia Simon, qui a remporté son premier titre mondial à Oberhof, en Allemagne, en 2023, c’est l’heure de la consécration.
Celle qui a commencé par le ski alpin aux côtés de son père, pisteur-secouriste à ses heures perdues, et opté pour le biathlon à la fin du collège, séduite par le tir à la carabine dans lequel elle excelle, est désormais la figure de proue du biathlon français, qui a fait preuve à Nove Mesto d’une bonne santé rayonnante. Avec douze médailles, l’équipe de France a réalisé la meilleure performance de son histoire aux championnats du monde, améliorant un record datant de 2016. Symbole éclatant de cette dynamique, qui repose essentiellement sur les athlètes femmes : lors de l’épreuve de sprint, le 9 février, les Françaises ont ravi les quatre premières places du classement. Les autres se contentent des miettes.