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Miracle

Basket : à la dernière seconde depuis le fin fond du terrain, le shoot incroyable de Roanne contre Blois

L’Américain Jordan Tucker a offert aux Roannais une victoire miraculeuse sur un tir venu d’ailleurs samedi 3 février, en première division française. Une action d’autant plus improbable que le héros d’un soir a longtemps erré dans l’antichambre de la NBA et les équipes anonymes.
Jordan Tucker sous les couleurs de Roanne, le 26 novembre 2023. (Herve Bellenger/Icon Sport)
publié le 4 février 2024 à 12h17

Un rebondissement inattendu, cruel pour une équipe, jouissif pour l’autre. Bref, le sport dans ce qu’il produit de mieux. Samedi 3 février soir à Blois (Loir-et-Cher), Jordan Tucker a réalisé un rêve que tout gosse fan de basket s’est mille fois imaginé. L’ADA Blois vient d’égaliser à 77 partout lorsque l’ailier américain de Roanne, qui à 25 ans effectue sa première saison dans l’élite du basket français, hérite du ballon à 2,4 secondes seulement de la fin du match. Le public blaisois est en train d’exulter, pensant avoir obtenu une prolongation encore inespérée quelques instants auparavant.

Depuis son propre camp, à une bonne vingtaine de mètres du panier adverse, Jordan Tucker balance alors un missile. Une tentative désespérée, dans un geste peu académique, à laquelle lui-même ne croyait probablement pas. Le buzzer sonne, les commentateurs évoquent déjà la prolongation à venir.

Mais après avoir volé un temps interminable à travers le terrain, la sphère orange transperce le filet de Blois. Le genre de miracle qui n’arrive jamais. 80-77 pour Roanne. Dans le public, l’euphorie est chassée par un gros coup de froid. Incrédules, les supporteurs restent béats, les mains sur la tête ou devant la bouche, pas certains de ce qu’ils viennent de voir. Silence de cathédrale dans la salle. De l’autre côté du terrain, les Roannais sautent sur Jordan Tucker.

L’histoire n’en est que plus belle, ou dramatique selon le camp dans lequel on se trouve, que Blois et Roanne luttent pour se maintenir en Pro A. Grâce à Jordan Tucker, les Roannais reviennent à une victoire des Blésois, premiers non relégable. Elle permet aussi la mise en lumière d’un joueur à l’histoire banale, dont le tir fait déjà le tour des pages de basket françaises et étrangères : celle d’un Américain qui s’est rêvé joueur NBA mais qui, à défaut d’avoir séduit les équipes de la grande ligue américaine, se retrouve à embrasser la carrière de globe-trotter.

Errance dans l’antichambre de la NBA

Avant de fouler les parquets français, Jordan Tucker a passé trois saisons dans le championnat universitaire américain, puis deux autres en G-League, sorte de réserve de la NBA où errent, souvent sans jamais en sortir, les indésirables. Certains y passent une carrière entière, espérant qu’un jour une opportunité s’ouvrira à eux dans l’élite du basket américain. D’autres, comme Tucker, sont plus réalistes et font le choix de l’exil, préférant aller vers des championnats moins renommés où ils pourront glaner quelques rayons de lumière. Pour l’Américain, ça a d’abord été le club de Bourgas, dans l’anonyme championnat bulgare, dont il était le meilleur marqueur la saison passée. Avant la Chorale de Roanne, où il est devenu cette saison l’un des leaders offensifs et a, grâce à un tir venu d’ailleurs, marqué à jamais ses supporteurs.

Il faudrait éplucher les livres de l’histoire de la balle orange pour savoir à quel rang, parmi les shoots miraculeux, classer celui-ci. Il y a trois ans, en NBA, lors d’un match entre Oklahoma et la Nouvelle Orléans, Devonte’Graham avait rentré un tir du même endroit, là aussi pour remporter un match. Ce shoot est encore aujourd’hui considéré par les spécialistes comme le tir au buzzer le plus lointain de l’histoire de la NBA. Ce samedi, de notre côté de l’Atlantique, Jordan Tucker a lui aussi accompli l’impossible.