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Alpinisme

«Cette cordée, c’était comme un groupe de rock» : dans les Grandes Jorasses, un trio au sommet

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Une saison en hiverdossier
Charles Dubouloz, Symon Welfringer et Clovis Paulin sont venus à bout ce lundi de la «Directissime» de l’éperon Walker, un éperon mythique du massif alpin, après cinq jours d’efforts. Ils racontent à «Libération» les coulisses de leur exploit.
Lors de l'ascension de la face Nord des Grandes Jorasses, entamée le 9 février. (Mathis Dumas. Millet)
par François Carrel, correspondant à Grenoble
publié le 15 février 2023 à 8h18

La face nord des Grandes Jorasses, dans le massif du Mont-Blanc, n’en finit pas d’aimanter les alpinistes de haut niveau, génération après génération. Charles Dubouloz, 33 ans, Symon Welfringer, 29 ans, et Clovis Paulin, 26 ans, tous trois guides de haute montagne, viennent ainsi de s’offrir la première ascension hivernale de la «Directissime» de l’éperon Walker, et du même coup la première répétition de cette voie méconnue, l’une des plus difficiles de la face. Personne n’avait eu l’audace d’y retourner depuis son ouverture par les grimpeurs d’exception Patrick Gabarrou et Hervé Bouvard, en cinq jours de l’été 1986. A fortiori en plein hiver, lorsque la face ne voit pas le soleil de la journée et où les températures ne passent jamais au-dessus des -10°C.

Si cette face Nord est légendaire, l’éperon Walker, le plus long de ses piliers, est mythique. Culminant à 4 208 mètres d’altitude, haut de 1 200 mètres et d’une raideur affolante, sa première ascension par les Italiens Riccardo Cassin, Luigi Esposito et Ugo Tizzoni en 1938 était entrée dans la légende. Un rêve pour tout alpiniste. Gabarrou et Bouvard avaient poussé le jeu jusqu’à l’épure en traçant à travers le pilier une «directissime» : un itinéraire se rapprochant le plus possible de la ligne droite, à l’aplomb du sommet, au prix de difficultés très élevées en escalade rocheuse.

«Une marche de plus dans le haut niveau»

Trente-six ans plus tard, au matin du 9 février 2023, Patrick Gabarrou, 71 ans, mentor de Clovis Paulin qu’il a mis sur le chemin du haut niveau,