Menu
Libération
Au-dessus des mortels

Liège-Bastogne-Liège : y a-t-il quelqu’un pour bastonner Pogacar sur la doyenne des classiques ?

Inarrêtable, le coureur slovène d’UAE Team Emirates est sur les bases d’une saison inouïe et d’un triplé sur les classiques ardennaises s’il remporte Liège-Bastogne-Liège ce dimanche 23 avril.
Tadej Pogacar lors de son triomphe au Tour des Flandres, le 2 avril, quand il devient le premier coureur depuis Eddy Merckx à remporter le Ronde et le Tour de France. (Eric Lalmand/Belga. AFP)
publié le 22 avril 2023 à 18h12

Décrit comme surhomme par ses adversaires à 24 ans, Tadej Pogacar était-il un surbébé ? Récemment, la mère du carnassier au regard doux et mutin a évoqué dans le Soir une aventure survenue à ses «neuf ou dix mois». «Pogi» grimpe sur un toboggan dans le jardin de la maison familiale de Komenda, près de Ljubljana, en Slovénie, par le «côté glissant». Tout en haut, il se fait pipi dessus, glisse grâce à l’urine et redescend ainsi «rapidement» du toboggan, sans encombre.

Mercredi, c’est d’une cascade dans le mur de Huy, côte finale de la Flèche Wallonne, que le coureur d’UAE Team Emirates a assis son début de saison inouï, d’abord les fesses posées sur sa selle quand tous ses concurrents escaladaient en danseuse, puis d’une accélération vertigineuse. A l’arrivée, le Slovène a rompu avec le monde des hommes, fusée Starship quittant (sans incident) l’atmosphère terrestre. Le Canadien Michael Woods écrit sur Instagram être arrivé «quatrième» de la course mais «le troisième mortel». Le jeune Danois Mattias Skjelmose, sur la seconde marche du podium, fait l’éloge de Pogi : «Il est incroyable, incomparable. Lorsqu’on est deuxième derrière celui qui est peut-être le meilleur coureur de tous les temps, on peut être content.» Et mémorialise : «C’est le genre de coureur qu’on ne voit qu’une fois par siècle.»

Depuis le début de la saison cycliste, Pogacar ouvre des voies inexplorées. Le coureur de 24 ans a remporté 12 victoires en 18 jours de course, dont un combiné Tour des Flandres, Amstel Gold Race, Flèche Wallonne. Du jamais vu. Ce dimanche 23 avril, il est sur les bases d’un triplé ardennais s’il règne sur Liège-Bastogne-Liège, ce qui n’a été réalisé que deux fois, par Davide Rebellin (2004) et Philippe Gilbert (2011). Ce dernier, en mars, exprimait à voix haute ce que tout le monde pense (ou dit, en premier lieu le Cannibale lui-même) : «On peut commencer à comparer Pogacar à Eddy Merckx.»

Divan rouge

Le double vainqueur du Tour de France, deuxième l’an dernier derrière Jonas Vingegaard – les deux vont récidiver cet été – vole sur les pavés et dans les raidards, est pareillement à l’aise dans les longues ascensions et les efforts solitaires à plusieurs dizaines de kilomètres de l’arrivée et, en prime, il peut descendre cul sec une pinte de bière en quatre secondes, comme le podium de l’Amstel Gold Race le 15 avril : rien ne lui échappe, ou si peu.

Le monde du vélo n’a plus qu’à s’asseoir sur un divan rouge, le cerveau frappé d’interrogations : faut-il désormais atteindre la deuxième place, puisque la première est déjà conquise d’avance par Tadej Pogacar ? Moins sarcastique et plus vertigineux : puisque la victoire semble hors de portée, faut-il pour les autres coureurs du peloton adapter leur calendrier en fonction de celui du Slovène ?

Dimanche, sur Liège-Bastogne-Liège, la dernière grande classique du printemps et ses 258 kilomètres, Pogacar (lauréat en 2021) affrontera Remco Evenepoel (vainqueur en 2022), qui sera secondé par le Français Julian Alaphilippe. Le mano a mano avec le jeune Belge, sensation du vélo au palmarès déjà dodu, s’annonce ébouriffant. Les deux hommes s’affrontent pour la première fois cette année, et seul Evenepoel, muni du maillot arc-en-ciel de champion du monde, semble en mesure d’ombrager la promenade de santé de Pogacar depuis mi-février. En mars, Evenepoel demandait à son adversaire sur les réseaux sociaux : «Arrête de gagner, merci», supplique agrémentée de quelques smileys (rire, clap-clap, flammes). Depuis, Pogacar a décroché sept victoires.